Immigration et cheminements scolaires aux études supérieures au Canada / 225 P. C. Kamanzi, N. Bastien, P. Doray, & M.-O. Magnan CSSHE SCÉES Canadian Journal of Higher Education Revue canadienne d’enseignement supérieur Volume 46, No. 2, 2016, pages 225 - 248 Immigration et cheminements scolaires aux études supérieures au Canada : qui y va et quand ? Une analyse longitudinale à partir du modèle de Cox Pierre Canisius Kamanzi Université de Montréal Nicolas Bastien Université du Québec à Montréal Pierre Doray Université du Québec à Montréal Marie-Odile Magnan Université de Montréal Résumé Le présent article vise à analyser les cheminements scolaires de jeunes Canadiens issus de l’immigration qui font des études supérieures. Pour ce faire, nous utilisons le modèle de risque proportionnel de Cox. Les résultats obtenus à partir des données longitudinales de l’Enquête auprès des jeunes en transition (EJET) montrent que le risque d’accès aux études supérieures est plus élevé chez les étudiants issus de l’immigration que chez leurs pairs dont les parents sont Canadiens de naissance. La différence varie de 3 à 35 points de pourcentage parmi ceux de première génération et de 4 à 13 points de pourcentage parmi ceux de deuxième génération. Par ailleurs, il existe des différences marquées entre les différents groupes d’étudiants issus de l’immigration, en ce qui concerne l’âge d’entrée aux études supérieures, la persévérance et le type de diplôme obtenu à l’âge de 24 ans. Bien que cette différence diminue relativement lorsqu’on tient compte des ressources des parents et des variables associées à l’expérience scolaire de l’élève au secondaire, elle demeure statistiquement significative. CJHE / RCES Volume 46, No. 2, 2016 Immigration et cheminements scolaires aux études supérieures au Canada / 226 P. C. Kamanzi, N. Bastien, P. Doray, & M.-O. Magnan Abstract This article aims to compare the educational pathways of young Canadian immigrants to those of their counterparts from non-immigrant families. To this end, we apply the Cox’s proportional hazard risk model. The results obtained from the longitudinal data from the Youth in Transition Survey (YIT) show that, in general, the risk of access to higher education is higher for students with an immigrant background than for their native peers. The variance ranges from 3 to 35 percentage points in first-generation immigrants and from 4 to 12 percentage points in second-generation immigrants. In addition, significant differences within youth with immigrant background were found with regard to the age of higher education entry, their persistence and the type of degree obtained by the age of 24. These differences are relatively reduced when one controls for the parents’ resources, as well as the student’s secondary school experience but remained statistically significant. Introduction Au cours des dernières décennies, l’expansion de l’économie du savoir (OECD, 2006) et les politiques de démocratisation scolaire ont conduit à la généralisation de l’enseignement supérieur de masse dans presque tous les pays industrialisés (OECD, 2012). Le diplôme d’études supérieures devient ainsi de plus en plus une condition obligatoire pour accéder à un emploi de qualité (Vultur, 2006). Toutefois, rien n’indique que cette massification implique l’équité et favorise la justice sociale (Ambler & Neathery, 1999; Shavit, Arum, & Gamoran, 2007) car, au contraire, les systèmes scolaires entretiennent, voire renforcent, des mécanismes de ségrégation sociale qui s’opèrent en grande partie par le truchement de l’organisation de parcours scolaires en enseignement primaire et secondaire (Dupriez & Dumay, 2005; Duru-Bellat, Mons, & Suchaut, 2004; Felouzis, 2009; Mons, 2007). Une abondante littérature à l’échelle internationale montre que cette ségrégation concerne particulièrement les jeunes issus de l’immigration (voir p. ex., Jackson, Erickson, Goldthorpe, & Yaish, 2007; Szulkin & Jonsson, 2007, pour le Royaume-Uni et la Suède ou encore Tolsma, Coenders, & Lubbers, 2006, pour les Pays-Bas). Ainsi, ces derniers sont moins susceptibles d’accéder aux études supérieures (Griga & Hadjar, 2014). Le présent article s’intéresse aux parcours scolaires de jeunes Canadiens issus de l’immigration. Les études qui portent sur cette question adoptent généralement une approche basée sur l’analyse transversale, examinant les facteurs qui influencent l’accès aux études supérieures à un moment ou un autre après l’obtention du diplôme d’études secondaires. Bien que ces études apportent des connaissances pertinentes, elles sont limitées, car elles ne permettent pas de saisir le processus de production des inégalités scolaires ou, à tout le moins, le moment où celles-ci s’accentuent. Afin de contribuer à l’avancement des connaissances sur le sujet, cet article aborde la question dans une perspective longitudinale. Une telle analyse trouve son importance dans le rôle que jouent les parcours scolaires dans la production des inégalités scolaires et sociales au fil du temps. Si l’accès aux études supérieures s’est démocratisé, tous les jeunes n’ont pas les mêmes ressources pour emprunter un parcours leur permettant de se préparer à la carrière professionnelle qu’ils souhaitent mener (Ertul, Melchior, & Warin, 2012). CJHE / RCES Volume 46, No. 2, 2016 Immigration et cheminements scolaires aux études supérieures au Canada / 227 P. C. Kamanzi, N. Bastien, P. Doray, & M.-O. Magnan De plus, accéder aux études supérieures est une chose, persévérer jusqu’à l’obtention du diplôme en est une autre. En particulier, la nature du parcours scolaire au niveau secondaire constitue un prédicteur de la persévérance aux études supérieures (GoldrickRab, 2006). À cet égard, plusieurs études menées aux États-Unis révèlent que les étudiants qui entreprennent tardivement des études supérieures sont plus sujets à l’abandon sans diplôme (Cassidy, 2012; Windham, Rehfuss, Williams, Pugh, & Tincher-Ladner, 2014) du fait des retards accumulés au secondaire (Kao & Thompson, 2003). Le présent article propose d’examiner les cheminements scolaires des jeunes Canadiens issus de l’immigration, à partir de leur âge d’accès aux études supérieures, pour tenter de saisir le processus de production des inégalités scolaires et sociales. À cette fin, un modèle d’analyse longitudinale a été appliqué pour montrer que ces inégalités sont liées à une différenciation de parcours scolaires entre les différents groupes d’étudiants issus de l’immigration. Plus précisément, cette analyse avait pour but de répondre à la question suivante : dans quelle mesure les cheminements scolaires, du point de vue de l’accès et de la persévérance aux études supérieures, varient-ils en fonction de l’origine géographique des parents des jeunes issus de l’immigration ? Le texte est divisé en quatre sections. La première consiste en une brève revue des écrits internationaux portant sur les parcours scolaires de jeunes issus de l’immigration, tout en mettant l’accent sur leurs performances scolaires, leurs chances d’accès aux études supérieures et les différentes formes de ségrégation dont ils font l’objet. La deuxième décrit la source des données utilisées, les variables étudiées et le modèle d’analyse. La troisième présente les résultats, tandis que la dernière section propose une conclusion qui met en relief l’essentiel des résultats de l’étude. Immigration et parcours scolaire Plusieurs études internationales récentes révèlent que les jeunes issus de l’immigration ont des résultats scolaires plus faibles et sont plus exposés à l’échec que leurs pairs issus de parents non immigrants. Il s’ensuit que peu d’entre eux accèdent aux études supérieures, en particulier à l’université, une situation qui semble se répéter dans plusieurs sociétés occidentales démocratiques, comme en témoignent des études tant comparatives (Dustmann, Frattini, & Lanzara, 2011; OECD, 2012; Park & Kyei, 2010; Park & Sandefur, 2010; Schnell & Azzolini, 2014; Schnepf, 2004) que nationales (voir, par ex., Murdoch & Guégnard [2014] en France, Tolsma, Coenders, & Lubbers [2006] aux Pays-Bas, et Chamillot [2014] en Suisse). La situation varie cependant entre pays. Une étude comparative de l’OECD (2012) révèle en effet que l’écart entre les résultats des élèves issus de l’immigration et leurs pairs dont les parents ne sont pas immigrants est particulièrement élevé en Belgique, en Suisse, en Allemagne et en France. À l’inverse, dans les trois pays que sont le Canada, l’Australie et la Nouvelle-Zélande, les élèves d’origine immigrante obtiennent des résultats comparables à ceux de leurs pairs issus de parents natifs du pays. Ces résultats corroboraient les conclusions des travaux de Hochschild et Cropper (2010) sur la question. Utilisant les données des tests PISA (lecture, mathématiques et sciences), ces auteurs ont comparé les résultats des élèves d’origine immigrante à ceux d’élèves issus de familles non immigrantes dans huit pays industrialisés (Suisse, Allemagne, Belgique, RoyaumeUni, Australie, France, Canada et États-Unis) et sont arrivés à des conclusions similaires. CJHE / RCES Volume 46, No. 2, 2016 Immigration et cheminements scolaires aux études supérieures au Canada / 228 P. C. Kamanzi, N. Bastien, P. Doray, & M.-O. Magnan À l’exception du Canada et de l’Australie où les résultats des deux groupes d’élèves étaient comparables, l’analyse montre que les élèves issus de l’immigration performent nettement moins bien que leurs pairs qui ne sont pas d’origine immigrante. Les analystes ont avancé deux piste d’explication pour comprendre ce contraste. Selon la première, les inégalités de performances scolaires entre les élèves issus de l’immigration et ceux dont les parents sont natifs du pays tiendraient en grande partie aux différences de politiques d’immigration. Selon Boyd (2002), les pays où ces inégalités sont faibles sont ceux qui, historiquement, se distinguent à la fois par une volonté politique et une culture clairement favorables à l’intégration sociale des immigrants. Or, comme l’observent Hochschild et Cropper (2010), la réussite éducative des immigrants est à la fois un indicateur et un instrument de leur intégration sociale au sein du pays d’accueil et est indissociable de sa politique en matière d’immigration. Autrement dit, les pratiques d’intégration sociale des adultes appuient l’intégration scolaire des jeunes1 et, par la suite, les jeunes scolairement intégrés deviennent des adultes socialement intégrés. À cet égard, certains travaux (voir, par exemple, Shakya et al., 2010) soulignent que nombre d’immigrants canadiens sont fortement stimulés par les dispositifs des systèmes scolaires en ce qui a trait à l’accessibilité des écoles et à la qualité des services éducatifs de soutien. Or, cela n’est pas toujours le cas dans plusieurs autres pays occidentaux. Tout en reconnaissant officiellement le mandat d’intégrer les immigrants dans les structures sociales, nombre de ces pays entretiennent plutôt, dans les faits, une culture d’exclusion sociale non avouée qui se traduit, entre autres, par des pratiques de sélection et de concentration des élèves issus de l’immigration dans les écoles des quartiers défavorisés, comme l’observe Schneeweis (2013) pour l’Autriche. Cette exclusion peut même prendre des formes de discrimination sociale formellement avouée. Tel serait le cas de pays comme la Grèce, l’Italie, l’Espagne, le Portugal (Schnell & Azzolini, 2014) ou l’Allemagne (Auernheimer, 2006; Rist, 1978) où les élèves immigrés sont marginalisés dans des établissements sous-équipés, avec un enseignement de moindre qualité. La deuxième piste d’explication avancée par les études récentes renvoie aux caractéristiques socioéconomiques des parents d’élèves et aux politiques de sélection auxquelles sont soumis les immigrants. Selon les tenants de cette hypothèse, les rares pays où les performances scolaires et la persévérance aux études des jeunes issus de l’immigration sont comparables à celles de leurs pairs dont les parents sont natifs du pays d’accueil se distinguent par des politiques de sélection et d’admission des immigrants sur la base de leurs qualifications et de leurs niveaux de scolarité (Boyd, 2002). Selon une étude de comparaison internationale (Lowell, 2005), le Canada, l’Australie et le RoyaumeUni viennent en tête de ces pays. De manière générale, le niveau de scolarité des jeunes issus de l’immigration est d’autant plus élevé qu’avant d’immigrer dans le pays d’accueil, les parents détiennent déjà certaines marques de statut socioéconomique élevé et ont été soumis au processus de sélection (Feliciano, 2005, Ichou, 2014). Alors que cette sélection est plus favorable à ceux qui détiennent un capital scolaire ou économique élevé, Ichou (2014) souligne le lien positif qui existe entre le statut socioéconomique des parents immigrés dans leur pays d’origine et le niveau de scolarité atteint par leurs enfants, même lorsque ce statut socioéconomique n’est pas recouvré dans le pays d’accueil. Au Canada, tout en reconnaissant que les politiques d’immigration favorisent la réussite scolaire des jeunes CJHE / RCES Volume 46, No. 2, 2016 Immigration et cheminements scolaires aux études supérieures au Canada / 229 P. C. Kamanzi, N. Bastien, P. Doray, & M.-O. Magnan issus de l’immigration, certains auteurs comme Boyd (2002), Rothon, Heath et LessardPhillips (2009), Hochschild et Cropper (2010) et, plus récemment, Mc Andrew (2015), soutiennent que cette réussite tient en grande partie aux qualités des immigrants euxmêmes. Autrement dit, de « bonnes » politiques d’intégration sociale en faveur des immigrants sont certes indispensables, mais encore faut-il que ces derniers soient à même de les mettre à profit. En ce qui concerne l’accès à l’enseignement supérieur, la situation n’est guère favorable aux jeunes issus de l’immigration dans la plupart des pays industrialisés (Crul et al., 2012; OECD, 2012). Ces derniers seraient la cible des ségrégations sociales, voire ethniques, que Felouzis, Liot et Perroton (2005) qualifient d’apartheid scolaire dans le cas de la France. En effet, la majorité de ces élèves est affectée dans des établissements « ségrégués » à forte concentration d’élèves issus de milieux défavorisés, caractérisés par des niveaux d’exigences de réussite et des rendements scolaires faibles. Une telle ségrégation sociale restreint en partie leur orientation scolaire à la formation professionnelle de type court et offre peu de chances d’accès à l’enseignement supérieur, comme l’observent, par exemple, Murdoch et Guégnard (2014) en France, Hupka et Stalder (2011) en Suisse ou Tolsma, Coenders et Lubbers (2006) aux Pays-Bas. À cet égard, le Canada détiendrait également un profil exceptionnel et fait partie des rares pays industrialisés où les jeunes issus de l’immigration ont des chances d’accès aux études supérieures comparables, voire même supérieures, dans certains cas, à celles de leurs concitoyens (Finnie & Mueller, 2008; Picot, 2012; Thiessen, 2009). Si cette participation accrue des immigrants canadiens aux études supérieures est le reflet d’une démocratisation scolaire indéniable, jusqu’où implique-t-elle la justice sociale ? De l’avis des analystes, la réponse à cette question devrait être nuancée, car cette tendance globale occulte des inégalités selon l’origine ethnique ou culturelle des parents de l’élève (voir, par exemple, Abada & Tenkorang, 2009; Thiessen, 2009). En effet, on observe à la fois une surreprésentation chez certains groupes d’immigrants et une sousreprésentation chez d’autres (Anisef, Brown, & Sweet, 2011, Ledent, Murdoch, & AitSaid, 2010). Par exemple, l’étude récente de Abada et Tenkorang (2009), à partir des données de l’enquête sur la diversité ethnique menée par Statistique Canada en 2002, révèle que, en comparaison aux Canadiens de naissance (36 %), le taux de participation aux études universitaires à l’âge de dix-huit ans est plus élevé chez les jeunes d’origine chinoise (54 %), des pays d’Asie du Sud-Est (44 %), mais plus faible chez les membres des communautés noires (31 %). Utilisant les données de l’Enquête auprès des jeunes en Transition (EJET, cohorte B), Thiessen (2009) est arrivé à des conclusions similaires. En guise d’interprétation, cet auteur souligne que le faible niveau de compétences scolaires et de participation aux études supérieures observé chez des jeunes issus des communautés noires et latino-américaines est l’effet d’interaction des facteurs culturels et structurels, pour reprendre les termes de l’auteur. Leur scolarité est fragilisée à la fois par les piètres conditions de vie de leurs familles et par des valeurs culturelles souvent défavorables à la réussite scolaire. D’autres travaux ont souligné l’existence d’une discrimination systémique à l’endroit de certains groupes ethniques, qui passe par des pratiques de regroupement à caractère ethnoculturel (Henry & Tator, 2009, 2010; Mickelson, 2003). De telles pratiques touchent particulièrement les élèves issus des communautés noires, comme en témoignent les travaux de Mc Andrew et al. (2008; 2013) ou de Henry et Tator (2010). À CJHE / RCES Volume 46, No. 2, 2016 Immigration et cheminements scolaires aux études supérieures au Canada / 230 P. C. Kamanzi, N. Bastien, P. Doray, & M.-O. Magnan cet égard, Potvin et Leclercq (2011) ont relevé des pratiques institutionnelles courantes qui consistent à reléguer ces élèves du secteur des jeunes vers celui des adultes (formation professionnelle courte), les éloignant ainsi des parcours axés aux études supérieures. En résumé, bien que la littérature sur la participation des immigrants aux études supérieures demeure restreinte au Canada, elle permet de tirer deux constats principaux. Premièrement, contrairement à plusieurs pays semblables, les jeunes Canadiens issus de l’immigration accèdent aux études supérieures dans une proportion plus élevée que leurs pairs issus de parents nés au Canada. Deuxièmement, il existe d’importantes différences d’accès aux études supérieures chez les immigrants selon leur origine géographique, différences qui pourraient masquer des ségrégations sociales. Le présent article a pour ambition d’aller plus loin en examinant le cheminement scolaire des étudiants pour mieux saisir la production de ces inégalités sur une trame temporelle. Avant d’illustrer nos propos par des données empiriques, nous précisons l’orientation méthodologique dans la section suivante : les données utilisées et les variables étudiées, ainsi que le modèle d’analyse statistique. Méthodologie L’article adopte une perspective d’analyse longitudinale qui présente plusieurs avantages dont deux nous semblent majeurs, comme le soulignent notamment Rajulton (2001), Willekens (2001), Plümper, Troeger et Manow (2005) et Hsiao (2007). Premièrement, elle permet de rendre compte de l’effet du temps sur le comportement étudié auprès des individus et de mesurer les variations intra-individuelles que l’analyse transversale ne permet pas de saisir. Deuxièmement, cette approche offre la possibilité de saisir le caractère dynamique de la relation entre deux variables dans le temps, contrairement à l’analyse transversale où cette relation est hypothétiquement considérée comme statique. Au total, la variance expliquée est plus élevée dans une analyse longitudinale que dans une analyse transversale. Source des données Dans cet article, les analyses sont effectuées à partir d’une enquête longitudinale, l’Enquête auprès des jeunes en transition (EJET, cohorte A). Cette enquête a été menée conjointement par Ressources humaines et développement des compétences Canada (RHDC) et Statistique Canada auprès d’un sous-échantillon de jeunes ayant passé les tests PISA à l’âge de 15 ans en 1999 et encore inscrits à l’école en 2000, et contient de l’information sur les parcours scolaires et les caractéristiques des parents des enquêtés (revenu, occupation, scolarité, structure familiale et lieu de naissance). Au total, les répondants ont été observés sur une période de huit ans, les données étant recueillies périodiquement tous les deux ans, soit quatre vagues de cueillette d’information. Les personnes enquêtées sont toutes nées en 1984. Par conséquent, elles étaient âgées de 15 ans en 1999 et de 24 ans en 2008. Au cycle 5 de l’enquête en 2008, l’échantillon avait diminué de moitié et s’élevait à 14 055 répondants. Afin de contrôler le biais généré par l’attrition inhérente aux enquêtes à passages répétés, nous avons appliqué aux analyses les poids longitudinaux fournis par Statistique Canada. CJHE / RCES Volume 46, No. 2, 2016 Immigration et cheminements scolaires aux études supérieures au Canada / 231 P. C. Kamanzi, N. Bastien, P. Doray, & M.-O. Magnan Définition des variables Deux variables dépendantes seront étudiées. La première a trait à l’accès aux études supérieures en fonction du moment où cet accès est réalisé. Dans le langage statistique de l’analyse longitudinale, elle sera nommée le risque ou la probabilité instantanée d’entrée aux études supérieures (collégiales ou universitaires2) après les études secondaires. Elle est donc dichotomique et indique à chaque âge si le répondant a participé ou non aux études supérieures. La deuxième est le fait d’avoir ou non obtenu un diplôme d’études supérieures (collégiales ou universitaires) à l’issue de la période d’observation en 2008. Elle est également dichotomique : 1) oui et 2) non. La variable indépendante principale est l’origine géographique des parents du répondant et est mesurée par le pays de naissance des deux parents. En nous inspirant des études antérieures sur la question (Finnie & Mueller, 2008; Thiessen, 2009) et en tenant compte du nombre de sujets disponibles, nous avons regroupé les sujets en sept catégories : 1) Canada (les deux parents sont nés au Canada), 2) couple mixte (un seul parent est Canadien de naissance), 3) Europe et pays anglo-saxons (États-Unis, Australie et Nouvelle-Zélande, etc.), 4) Asie du Sud-Est (Chine, Corée, Japon, Vietnam, Inde, etc.), 5) Afrique subsaharienne, 6) Amérique latine et Caraïbes, et 7) Autres (Afrique du Nord, Moyen-Orient, Asie méridionale, îles du Pacifique, etc.). Signalons toutefois que la catégorie « autres » ne fera pas l’objet d’interprétation en raison de sa composition extrêmement hétérogène. Elle sera incluse dans le modèle, essentiellement dans l’objectif de réduire les effets de l’attrition. Pour chaque catégorie, exception faite bien sûr des deux premières, nous tâcherons de distinguer les immigrants de 1re et ceux de 2e génération3 là où les effectifs des sujets permettent d’effectuer les analyses pertinentes4. Trois catégories de variables témoins seront prises en compte : 1) les ressources des parents, 2) l’expérience scolaire de l’élève, et 3) ses caractéristiques sociodémographiques. En ce qui a trait aux ressources des parents, nous avons retenu le revenu annuel combiné des deux parents (capital économique) et le niveau d’études du parent le plus scolarisé (capital scolaire). Pour l’expérience scolaire, deux variables ont été retenues : 1) la moyenne générale à la fin du secondaire et 2) les scores obtenus aux tests PISA en lecture. Enfin, deux variables sociodémographiques communément associées au cheminement scolaire seront également incluses dans l’analyse : 1) le genre et 2) la région de résidence, pour tenir compte des différences d’organisation du système scolaire. Stratégie d’analyse statistique. Nous étudions la transition aux études supérieures. Dans un premier temps, des analyses descriptives bivariées seront effectuées pour rendre compte du portrait des parcours scolaires aux études supérieures selon la variable indépendante d’intérêt (origine géographique des parents). Nous procédons ensuite à des analyses multivariées avec un modèle de risque (ou de probabilité instantanée) à temps discret (Singer & Willet, 1993; Willet & Singer, 1995; Wright, 2002). Les données utilisées permettent de déterminer l’année à laquelle le répondant a fréquenté pour la première fois un établissement d’éducation supérieure et quel était son âge. Selon ce modèle, le répondant est exposé au risque d’entrée aux études supérieures tant et aussi longtemps qu’il n’a pas effectué cette entrée; il cesse de l’être dès que celle-ci est réalisée pour la première fois. L’échantillon est composé de répondants du même âge dont le début de l’exposition au risque d’accès aux études supérieures est relativement le même, à quelques mois de différence. CJHE / RCES Volume 46, No. 2, 2016 Immigration et cheminements scolaires aux études supérieures au Canada / 232 P. C. Kamanzi, N. Bastien, P. Doray, & M.-O. Magnan Afin de tenir compte des variables de contrôle, notamment associées à l’expérience scolaire et aux ressources des parents, et d’estimer les effets, nous utilisons le modèle de risque proportionnel de Cox (1972). Plusieurs avantages sont reconnus à ce modèle, mais nous nous limiterons à en mentionner trois qui sont considérés comme essentiels (Kleinbaun & Klein, 2012; Lee & Wang, 2013). Premièrement, le modèle tient compte de la variable temps et est robuste. Deuxièmement, il s’adapte aux données censurées et aux données dont la période d’observation est variable entre les sujets. Troisièmement, le modèle permet d’estimer les coefficients de régression, même lorsque le risque de base h0 (t) n’est pas spécifié, autrement dit sans que celui-ci soit soumis à une loi statistique précise. Selon ce modèle, tel que développé entre autres par Hosmer, Lemeshonw et May (2008), le risque instantané est établi comme suit : loghi(t; X1, X2, ... Xk) = α(t) + β1X1 + β2X2 + ... + βkXk (1) ou hi (t; X1, X2, ... Xk) = h0 (t) exp (β1X1 + β2X2 + ... + βkXk) = h0 (t)e β1X1 + β2X2 + ... + βkXk (2) où hi(t) représente le risque ou la probabilité instantanée qu’a un individu d’entreprendre des études supérieures durant la période d’observation sous l’influence de X1, X2 …Xk considérés comme facteurs de risque et h0(t) le risque de base sous l’effet de la seule variable « temps » t. L’analyse permet d’établir les coefficients de régression β1, β2, …βk respectivement associés aux variables X1, X2 …Xk. Comme dans un modèle linéaire, on peut établir une constante (le risque de base) et son coefficient, qui sont respectivement représentés dans les équations par h0(t) et α. Dans le cas présent, nous étudions le risque instantané (ou la probabilité instantanée ou le taux instantané) d’entrée ou d’accès aux études supérieures sous l’influence des caractéristiques de l’individu X1, X2 …Xk. Par défaut, la variable dépendante portant sur l’accès aux études supérieures prend donc la valeur 0 et change à la valeur 1 au moment où l’individu débute son premier programme d’études supérieures. Pour faciliter l’interprétation des résultats, nous utilisons les rapports de risque (RR) (ou hazard ratios) que l’on peut déduire des équations (1) et (2) comme suit : h(t; Xi=1) RR = = h0 (t)e βiXi (3) h(t; Xi=0) Dans cette équation (3), Xi=1 représente la présence de la caractéristique dont on exa- mine l’effet sur le risque de l’événement étudié et Xi=0 représente l’absence de cette même caractéristique ou la modalité de référence. Par conséquent, dans un modèle multivarié, les rapports de risque sont établis comme suit : h(t; X1=1; X2=1;... Xk=1; ) RR = = h0 (t)e β1X1 + β2X2 + ... βkXk (4) h(t; X1=0; X2=1;... Xk=1; ) Dès lors, pour une caractéristique X à k modalités, on établira (k-1)RR. CJHE / RCES Volume 46, No. 2, 2016 Immigration et cheminements scolaires aux études supérieures au Canada / 233 P. C. Kamanzi, N. Bastien, P. Doray, & M.-O. Magnan Présentation des résultats Accès aux études supérieures À la fin des études secondaires ou quelques années après l’obtention du diplôme d’études secondaires, la majorité des jeunes Canadiens poursuivent des études supérieures (collégiales ou universitaires). Selon les données utilisées dans cette étude, trois quarts (78 %) des jeunes nés en 1984 et âgés de 24 ans en 2008 avaient fréquenté à un moment ou un autre un établissement d’enseignement collégial ou universitaire (tableau 1). La situation varie cependant selon l’origine géographique des parents de l’élève. Comme l’indique le tableau 1, le taux de participation aux études supérieures est nettement plus élevé chez les jeunes issus de l’immigration que chez leurs pairs dont les parents sont nés au Canada. En effet, il est de 78 % (30 + 48) chez ces derniers, alors que chez les jeunes issus de l’immigration, à l’exception des répondants originaires d’Amérique latine ou des Caraïbes (64 %), il est supérieur à 90 % dans notre échantillon : 100 % pour ceux d’origine africaine, 96 % pour les Asiatiques et 94 % pour ceux immigrés de l’Europe et des pays anglo-saxons. Qui plus est, à l’exception de ceux d’origine européenne, la majorité d’entre eux s’inscrit à l’université : 99 % pour les Africains, 84 % pour les Asiatiques et 56 % pour les Latino-Américains et Caribéens. Tableau 1 : Accès aux études supérieures (ÉS) selon l’origine géographique des répondants (%) Collège Université Ensemble Collège / Université N Deux parents nés au Canada 30 48 78 8 900 Un seul parent né au Canada 28 40 68 2 047 Europe / pays anglo-saxon 73 21 94 462 Asie du Sud-Est 12 84 96 518 Afrique subsaharienne 1 99 100 245 Amérique latine et Caraïbes 8 56 64 750 Autres 21 43 64 1 033 Tous les répondants 29 47 76 14 055 Origine géographique et cheminements scolaires différés Les analyses qui suivent vont plus loin et visent à montrer que ces inégalités sont associées à une différenciation des parcours. Dans un premier temps, nous montrons que les inégalités d’accès aux études supérieures entre les jeunes issus de l’immigration et leurs pairs dont les parents sont nés au Canada sont le résultat des différences de cheminements scolaires. Dans un deuxième temps, nous examinons si ces différences exercent, à moyen terme, un effet sur la persévérance aux études. CJHE / RCES Volume 46, No. 2, 2016 Immigration et cheminements scolaires aux études supérieures au Canada / 234 P. C. Kamanzi, N. Bastien, P. Doray, & M.-O. Magnan Le mouvement d’entrée des jeunes Canadiens aux études supérieures s’amorce vers dix-sept ans mais dans une proportion relativement faible (8 %), puis s’accélère entre dix-huit et dix-neuf ans (50 %) avant de ralentir à partir de 20 ans (tableau 2). Comme l’indique le tableau 2, l’évolution du flux d’entrée à différents âges varie significativement selon l’origine géographique des parents. Au départ, ce flux est plus élevé chez les élèves dont au moins un parent est né au Canada. À l’âge de dix-sept ans, presque un élève sur dix s’est inscrit dans un établissement d’études supérieures, alors que seulement 1 % à 3 % de leurs pairs issus de l’immigration effectuent cette transition au même âge. Par la suite, le mouvement s’inverse : si, à dix-huit ans, le taux d’accès aux études supérieures augmente de 10 % à 31 % (10+21) chez les répondants issus de parents nés au Canada, il accroît rapidement de 3 % à 56 % (53+3) chez les Asiatiques et de 1 % à 51 % pour leurs pairs d’origine latino-américaine ou caribéenne. Toutefois, force est de constater que la situation varie aussi parmi les différents groupes de jeunes issus de l’immigration euxmêmes. Ainsi, jusqu’à cet âge (18 ans), le taux d’accès demeure faible pour les élèves d’origine africaine (6 %) et européenne (11 %). C’est à l’âge de 19 ans et de 20 ans que ces deux derniers groupes d’élèves enregistrent une forte proportion d’accès aux études supérieures, soit une augmentation respectivement de 93 % pour les premiers et de 64 % pour les seconds. Nous examinerons dans la sous-section suivante, à l’aide du test de proportionnalité du modèle de Cox, si ces différences selon l’origine géographique des parents sont constantes ou si, au contraire, elles varient dans le temps. Tableau 2 : Accès aux études supérieures selon l’origine géographique des parents et l’âge (%) 17 ans 18 ans 19 ans 20 ans 21 ans 22 ans 23 ans Total 10 21 28 7 4 1 1 72 Un seul parent né au Canada 9 19 28 6 3 1 1 67 Europe / pays anglo-saxon 2 9 15 64 1 1 1 93 Asie du Sud-Est 3 53 35 3 2 0 0 96 Afrique subsaharienne 3 3 93 1 0 0 0 100 Amérique latine et Caraïbes 1 50 10 3 0 0 0 64 Autres 7 20 27 6 3 1 0 64 Tous les répondants 8 23 27 11 3 1 1 74 Canada Note : ce tableau exclut les répondants qui ont déclaré avoir fréquenté un établissement d’enseignement supérieur sans préciser à quel âge ils s’y sont inscrits, d’où une légère différence avec les données du tableau 1. Il ressort de cette analyse que chaque groupe a tendance à constituer un profil de cheminement scolaire différent des autres répondants. Ainsi, comme l’indiquent la figure 1 et le tableau 2, l’âge modal d’entrée aux études supérieures varie fortement en fonction de l’origine géographique des parents des répondants. Celui-ci est de 18 ans pour les jeunes d’origine asiatique (53 %), latino-américaine et caribéenne (50 %). En CJHE / RCES Volume 46, No. 2, 2016 Immigration et cheminements scolaires aux études supérieures au Canada / 235 P. C. Kamanzi, N. Bastien, P. Doray, & M.-O. Magnan revanche, cet âge monte à 19 ans pour ceux issus de familles canadiennes de naissance (28 %) et ceux originaires d’Afrique subsaharienne (93 %) et à 20 ans (64 %) pour les élèves dont les parents ont immigré d’un pays européen ou anglo-saxon. En comparaison aux jeunes Canadiens dont les parents sont nés au Canada, il est possible de distinguer trois profils de cheminement aux études. À l’extrême de l’axe de cette comparaison se trouvent les Latino-Américains et Caribéens (profil 1). Alors que leur taux d’accès est le moins élevé de tous (64 %), ces derniers se distinguent en revanche par un rythme d’entrée très rapide par rapport aux autres groupes de répondants, mais qui ralentit, voire s’arrête aussitôt. À l’autre extrême de l’axe se situent les jeunes d’origine africaine (profil 2) dont le profil de cheminement est quelque peu inverse : leur entrée aux études supérieures s’effectue un peu plus tardivement que celle des autres répondants, mais avec la proportion d’accès aux études supérieures la plus élevée. En effet, la presque totalité d’entre eux (93 %) accède aux études supérieures à dix-neuf ans. Au milieu de l’axe se trouvent les jeunes d’origine européenne dont l’entrée s’effectue progressivement, mais à un rythme plutôt accéléré (profil 3). Les Asiatiques constituent un cas de figure un peu similaire avec un rythme d’entrée également progressif (profil 4). Toutefois, leur cheminement se distingue des autres groupes, à la fois par le rythme d’entrée rapide et par une proportion élevée de participation aux études supérieures entre dix-huit ans et dix-neuf ans (88 %). 100 Canada Europe / pays anglo-saxons Afrique subsaharienne Autres Un seul parent né au Canada Asie du Sud-Est Amérique latine et Caraïbes 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0 17 ans 18 ans 19 ans 20 ans 21 ans 22 ans Source : tableau 2 Figure 1 : Taux cumulatifs d’accès aux études supérieures selon l’âge et l’origine géographique des parents CJHE / RCES Volume 46, No. 2, 2016 23 ans Immigration et cheminements scolaires aux études supérieures au Canada / 236 P. C. Kamanzi, N. Bastien, P. Doray, & M.-O. Magnan Analyse de survie Pour affiner la comparaison, des analyses de risque proportionnel de Cox ont été effectuées. Rappelons que ces analyses reposent sur l’hypothèse de la proportionnalité selon laquelle le risque étudié est distribué de façon constante sur la période d’observation. Celles-ci tiennent compte d’autres facteurs susceptibles d’influencer le cheminement scolaire. Le modèle 1 examine d’abord l’influence de l’origine géographique des parents du répondant, en distinguant les immigrants de 1re et de 2e génération, et en tenant compte de leur région ou province de résidence, ainsi que du genre du répondant. Les résultats permettent de dégager trois constats. Premièrement, le risque instantané d’entrée aux études supérieures varie de façon significative selon l’origine géographique des parents du répondant. Dans l’ensemble, il est moins élevé chez les jeunes dont les parents sont des Canadiens de naissance (catégorie de référence), comparativement à leurs pairs issus de l’immigration. Deuxièmement, il varie entre ces derniers eux-mêmes. Ainsi, il est relativement plus élevé chez ceux dont les parents ont immigré d’un pays européen ou anglo-saxon, de l’Afrique subsaharienne et, dans une moindre mesure, de l’Asie du SudEst. Troisièmement, cette différence est d’autant plus marquée qu’il s’agit d’immigrants de première génération, alors que les jeunes immigrants de deuxième génération ont tendance à se comporter comme ceux de 3e génération, c’est-à-dire comme les jeunes dont les parents sont des Canadiens de naissance. En d’autres termes, l’influence de l’origine géographique des parents sur le cheminement aux études supérieures varie selon que les répondants sont nés au Canada ou à l’étranger. Dans le modèle 2, deux variables en lien avec l’expérience scolaire au secondaire sont ajoutées : la moyenne générale au secondaire et les scores aux tests de PISA en lecture. Les résultats révèlent que le risque d’accès aux études supérieures est significativement associé à ces deux variables. Plus précisément, il augmente avec les performances scolaires de l’élève au secondaire. Par ailleurs, l’ajout de ces variables modifie l’influence de l’origine géographique des répondants, qui diminue dans certains cas ou augmente dans d’autres, mais demeure significative. Notons aussi que l’introduction des variables associées à l’expérience scolaire produit des effets différents en fonction de l’origine géographique des parents et selon que le répondant est un immigrant de 1re ou de 2e génération. Ainsi, pour les immigrants de 1re génération issus de parents originaires d’Afrique subsaharienne, d’Europe ou de pays anglo-saxons, l’influence de l’origine géographique des parents augmente, alors qu’elle disparaît pour leurs pairs de 2e génération. Cela appuie l’hypothèse que, pour la deuxième génération, les différences par rapport à la catégorie de référence (Canada) tiennent davantage aux performances scolaires qu’à l’origine des parents. Par contre, il ressort de cela que pour les jeunes de 1re génération, le fait d’être né ailleurs qu’au Canada exerce, en soi, un effet significatif sur le risque d’accès aux études supérieures. En d’autres termes, à performances scolaires comparables, les élèves immigrants de 2e génération originaires d’Afrique subsaharienne, d’Europe ou d’un pays anglo-saxon ont des cheminements aux études supérieures comparables à ceux de leurs pairs issus de parents nés au Canada, contrairement à leurs pairs de 1re génération. En ce qui a trait aux répondants originaires d’Asie du Sud-Est, qu’ils soient de 1re ou de 2e génération, leur risque d’accès aux études supérieures diminue légèrement lorsqu’on tient compte de la moyenne générale et des scores PISA, mais demeure significativement CJHE / RCES Volume 46, No. 2, 2016 Immigration et cheminements scolaires aux études supérieures au Canada / 237 P. C. Kamanzi, N. Bastien, P. Doray, & M.-O. Magnan supérieure à celle de leurs pairs issus de parents nés au Canada. La situation est inverse pour les Latino-Américains et Caribéens. Que ces derniers soient de 1re ou de 2e génération, le risque d’accès aux études supérieures se révèle moins élevé, comparativement à la catégorie de référence. Ce résultat suggère l’hypothèse que ceux parmi eux qui accèdent aux études supérieures se distinguent par des performances scolaires élevées. Une analyse supplémentaire intra sous-groupe montre que les résultats vont plus ou moins dans ce sens. En effet, contrairement aux autres sous-groupes, notamment ceux dont les parents sont nés au Canada (catégorie de référence), le sous-échantillon des Latino-Américains et des Caribéens est composé de deux groupes contrastés sur le plan scolaire : le premier qui a des compétences scolaires élevées et qui s’inscrit dans sa totalité à l’université à l’âge de dix-huit ans et le second avec résultats scolaires faibles, qui ne s’inscrit à aucune forme d’études supérieures, du moins pour la période d’observation. Il en résulte que lorsqu’on tient compte des variables associées à la scolarité, le risque d’accès aux études supérieures diminue. Dans le modèle 3, deux variables relatives à l’origine socioéconomique ont été ajoutées : le niveau d’études du parent le plus scolarisé et le revenu annuel combiné des deux parents. Les résultats révèlent que le risque relatif d’accès aux études supérieures augmente avec la scolarité des parents, mais il se révèle relativement comparable entre les répondants dont les parents détiennent un diplôme d’études postsecondaires collégiales ou universitaires. De même, il est plus élevé chez les jeunes issus de familles à revenu moyen et supérieur. En outre, l’introduction de ces deux variables modifie légèrement l’influence de l’origine géographique des répondants, qui demeure toutefois significative, particulièrement pour les immigrants de 1re génération. Ainsi, la tendance observée au modèle 2 se maintient : par rapport à la catégorie de référence (parents nés au Canada), la probabilité instantanée d’accès aux études supérieures demeure relativement plus élevée pour les immigrants de 1re génération dont les parents sont immigrés d’un pays européen ou anglo-saxon, d’Afrique subsaharienne ou d’Asie du Sud-Est. Toutefois, pour ces derniers, la différence reste significative pour les immigrants de 1re et de 2e génération. Les Latino-Américains et les Caribéens représentent quant à eux un cas de figure particulier. En effet, ils sont les seuls dont le risque d’accès aux études supérieures est significativement inférieur à celui de leurs pairs dont les parents sont natifs du Canada. Ce résultat n’est pas surprenant, dans la mesure où, d’une part, ces étudiants participent aux études supérieures dans une proportion moins élevée que les autres répondants et, d’autre part, leur flux d’entrée s’arrête un peu plus tôt (voir tableau 2 et figure 1). Afin d’examiner si l’influence des différentes variables incluses dans le modèle est constante ou non dans le temps, un test de proportionnalité (Kleinbaum & Klein, 2012) a été effectué. Les résultats (Annexe 1, tableau 1)5 révèlent que la variation des coefficients associés à la variable d’intérêt (origine géographique des parents), ainsi qu’aux différentes variables de contrôle n’est pas statistiquement significative, sauf pour la variable « région »7. Autrement dit, l’influence de ces variables sur le cheminement aux études supérieures demeure relativement constante durant la période d’observation, et n’est pas attribuable à l’effet de la variable « temps ». Au total, le risque d’accès aux études supérieures est significativement associé à l’origine géographique des parents de l’élève, de même qu’il varie entre les immigrants de 1re et de 2e génération. De plus, l’influence de l’origine géographique se fait en partie par la médiation des écarts de performances scolaires entre les différents sous-groupes d’élèves issus de l’immigration. CJHE / RCES Volume 46, No. 2, 2016 Immigration et cheminements scolaires aux études supérieures au Canada / 238 P. C. Kamanzi, N. Bastien, P. Doray, & M.-O. Magnan Tableau 3 : Rapport de risque d’accès aux ÉS selon l’origine géographique des parents entre 17 ans et 23 ans Modèle 1 Pays de naissance des parents Deux parents nés au Canada (référence) Un seul parent né au Canada Europe / pays anglo-saxon 1re génération 2e génération Asie du Sud-Est 1re génération 2e génération Afrique subsaharienne 1re génération 2e génération Amérique latine et Caraïbes 1re génération 2e génération Autres 1re génération 2e génération Moyenne générale au secondaire 91 – 100 % 81 – 90 % 71 – 80 % (référence) 70 % ou moins Score PISA lecture Revenu annuel des parents Supérieur (4e quartile) Moyen supérieur (3e quartile) Moyen inférieur (2e quartile) Inférieur (1er quartile) (référence) Non déclaré / Ne sait pas Niveau de scolarité des parents Universitaire Collégial Secondaire (référence) Genre (femme) Modèle 2 Modèle 3 (1,00) 0,83*** (1,00) 0,85*** (1,00) 0,92*** 1,35*** 1,04* 1,44*** 0,97 (ns) 1,38*** 0,96 (ns) 1,25*** 1,12*** 1,09*** 1,11*** 1,09*** 1,20*** 1,31*** 1,13* 1,61*** 1,00 (ns) 1,30*** 1,01 (ns) 1,08*** 0,73*** 0,89*** 0,81*** 0,94*** 0,87*** 1,03* 0,71*** 1,08*** 0,89*** 1,14*** 0,72*** - 1,17*** 1,18*** (1,00) 0,82*** 1,13*** 1,13*** 1,15*** (1,00) 0,82*** 1,11*** - - 1,80*** 1,30*** 1,28*** (1,00) 1,30*** 1,16*** 1,01* 1,16*** 1,14*** (1,00) 1,05*** CJHE / RCES Volume 46, No. 2, 2016 Immigration et cheminements scolaires aux études supérieures au Canada / 239 P. C. Kamanzi, N. Bastien, P. Doray, & M.-O. Magnan Région de résidence Ontario (référence) Québec Maritimes Prairies Colombie-Britannique R.V. D. L. Personnes-années (1,00) 0,89*** 0,87*** 0,77*** 0,81*** 9 808,85*** 16 1 320 120 (1,00) 0,89*** 0,87*** 0,91*** 0,82*** 13 057,93*** 20 1 320 120 (1,00) 0,94*** 0,91*** 0,94*** 0,93*** 16 694,20*** 26 1 320 120 * : p < 0,05; ** : p < 0,01; *** : p < 0,001, ns : non significatif au seuil de 0,05; R.V. : Rapport de vraisemblance (Likelihood ratio - L.R.); D.L. : Degré de liberté (Degree of freedom – DF) Cheminement aux études et persévérance L’analyse suivante vise à examiner dans quelle mesure ces différences de cheminement scolaire aux études supérieures ont une implication sur la persévérance aux études. Soulignons qu’en raison de faibles effectifs des sous-catégories et des règles de confidentialité relatives à la base de données, il nous est impossible de présenter les résultats d’une analyse longitudinale distinguant les taux de diplomation selon l’âge d’entrée aux études supérieures. Nous nous limitons donc ici à distinguer seulement ceux qui ont obtenu un diplôme et ceux qui n’en ont pas obtenu. Pour les mêmes raisons, nous n’effectuons pas de distinction entre les répondants qui n’ont obtenu aucun diplôme mais sont encore aux études, et ceux qui les ont abandonnées, de même qu’entre les immigrants de 1re et de 2e génération. Rappelons que la majorité des jeunes Canadiens entreprennent des études supérieures dans un collège ou une université entre dix-huit ans et dix-neuf ans. Le tableau 4 indique qu’à l’âge de 24 ans, les deux tiers (65 %) d’entre eux ont obtenu un diplôme, soit 38 % au collège et 27 % à l’université, ce qui témoigne d’une persévérance scolaire aux études élevée. Ce taux de diplomation est cependant variable selon l’origine géographique des parents. Il est moins élevé chez les étudiants dont les parents sont nés au Canada (58 %) que chez leurs pairs issus de l’immigration, de même qu’il varie parmi ces derniers. Ainsi, alors qu’il est de 68 % chez les Asiatiques, il est de l’ordre de 95 % chez les étudiants issus de parents immigrés d’Afrique, de 91 % chez ceux d’origine latinoaméricaine et caribéenne, et de 88 % chez ceux dont les parents ont immigré d’Europe ou de pays anglo-saxons. L’interprétation de ces différences mérite cependant d’être nuancée car, sur le plan qualitatif, il se dessine des inégalités scolaires entre les groupes étudiés. Même si on observe des taux de diplomation élevés, quelle que soit l’origine géographique des étudiants, il y a lieu de noter que les répondants d’origine africaine (9 %) et européenne (11 %) obtiennent un diplôme d’études universitaire dans une proportion faible, et ce, contrairement à leurs pairs d’origine asiatique (58 %), latino-américaine ou caribéenne (83 %). Ces inégalités s’expliquent en partie par des différences de parcours. CJHE / RCES Volume 46, No. 2, 2016 Immigration et cheminements scolaires aux études supérieures au Canada / 240 P. C. Kamanzi, N. Bastien, P. Doray, & M.-O. Magnan En tenant compte du premier programme auquel les répondants étaient inscrits au départ et du type de diplôme obtenu à la fin de la période d’observation, l’analyse permet de distinguer deux cas. Le premier est celui des groupes qui suivent un parcours continu et dont les taux de diplomation au collège ou à l’université reflètent les taux d’inscription au premier programme. Il s’agit des Asiatiques, des Latino-Américains et des Caribéens, ainsi que des répondants dont les parents ont immigré d’Europe. Leurs taux de diplomation sont élevés dans les programmes où ils se sont davantage inscrits au départ. Ainsi, 58 % des Asiatiques et 83 % des Latino-Américains et Caribéens ont obtenu un diplôme universitaire, tandis que 77 % de leurs pairs immigrés d’Europe ont décroché un diplôme professionnel de niveau collégial. Le second cas est celui des répondants issus des parents immigrés d’Afrique subsaharienne dont le parcours scolaire est caractérisé par une discontinuité. Alors qu’au départ, la majorité (93 %) s’était inscrite dans une université, plusieurs d’entre eux ont effectué une bifurcation (Bidart, 2006)6 vers le collège (cégep ou community college) où ils ont pu par la suite décrocher un diplôme de formation professionnelle ou technique dans une forte proportion (86 %). La situation est quelque peu similaire chez leurs pairs issus de parents canadiens de naissance. En effet, leur taux de diplomation est plus marqué au collège (36 %) alors qu’initialement la majorité était inscrite à l’université. On peut soutenir l’hypothèse qu’une forte proportion d’entre eux a également effectué une bifurcation vers le collège après avoir interrompu des études universitaires. Encore une fois, ces constats doivent être nuancés, car une partie de ceux qui ne détiennent pas de diplôme sont encore inscrits aux études et sont susceptibles d’en obtenir un après la période d’observation. Tableau 4 : Taux d’obtention du diplôme selon l’origine géographique des parents du répondant Pays de naissance des parents Canada Un seul parent né au Canada Europe / pays anglo-saxon Asie du Sud-Est Afrique subsaharienne Amérique latine et Caraïbes Autres Tous les répondants Aucun diplôme 42 39 12 32 5 9 40 35 Diplôme collégial 36 36 77 10 86 8 33 38 Diplôme universitaire 22 25 11 58 9 83 27 27 N 7 178 1 502 433 504 245 270 806 10 938 Globalement, les résultats révèlent des différences significatives de cheminement scolaire selon l’origine géographique des parents, aussi bien en ce qui concerne l’accès que la persévérance aux études. Ces différences s’observent, d’une part, entre les jeunes issus de parents nés au Canada et leurs pairs issus de l’immigration et, d’autre part, entre les jeunes issus de l’immigration. CJHE / RCES Volume 46, No. 2, 2016 Immigration et cheminements scolaires aux études supérieures au Canada / 241 P. C. Kamanzi, N. Bastien, P. Doray, & M.-O. Magnan Conclusion Le présent article avait pour objectif d’analyser le cheminement scolaire des jeunes Canadiens issus de l’immigration pour mieux saisir les inégalités sociales observées dans les études antérieures en fonction de l’origine géographique (Abada & Tenkorang, 2009; Thiessen, 2009). Les résultats obtenus à partir une base de données pancanadienne permettent de dégager deux constats principaux. Premièrement, à l’exception des LatinoAméricains et des Caribéens, les jeunes Canadiens issus de l’immigration accèdent aux études supérieures dans une proportion plus élevée que leurs pairs nés de parents non immigrants, ce qui corrobore les études citées précédemment, notamment celles de Abada et Tenkorang (2009), Thiessen (2009), Anisef, Brown et Sweet (2011), ainsi que Ledent, Murdoch et Ait-Said (2010). À l’échelle internationale, ils convergent également avec plusieurs autres travaux dont ceux de Douglass et Thomson (2010) aux États-Unis, ainsi que Jackson et al. (2007, 2012) au Royaume-Uni et en Suède, pour ne citer que ceux-là. Deuxièmement, et c’est ce qui fait l’originalité et la contribution principale de cet article, l’analyse révèle que le cheminement scolaire varie selon l’origine géographique des parents des élèves. À cet égard, l’étude s’est intéressée à l’âge d’entrée aux études supérieures et à la persévérance. De ce point de vue, non seulement nos résultats corroborent-ils les études antérieures, mais ils apportent aussi des connaissances supplémentaires essentielles, tant sur le plan théorique que social. En tenant compte de l’âge d’accès aux études, de la continuité ou de la discontinuité du parcours scolaire, de la persévérance des étudiants, ainsi que du type de diplôme obtenu, l’analyse a permis de dégager quatre profils de cheminement. Le premier est celui des Latino-Américains et des Caribéens qui, même si leur participation aux études supérieures est relativement moins élevée par rapport aux autres, se distinguent par une persévérance élevée : la moitié d’entre eux accède aux études supérieures à l’âge de dixhuit ans et huit sur dix obtiennent un diplôme d’études universitaires. Le second profil est celui des Asiatiques qui, sur le plan qualitatif et quantitatif, constitue le groupe le plus performant et présente un parcours exceptionnel : leur parcours scolaire se caractérise par une entrée rapide et massive à l’université et par un taux de diplomation élevé. Le troisième est celui des répondants issus de familles immigrées d’Europe. Contrairement aux autres répondants d’origine immigrante, la majorité d’entre eux commence les études supérieures plus tardivement (à 20 ans) et s’inscrit dans un collège où presque huit sur dix obtiennent un diplôme. Le quatrième et dernier profil est celui des étudiants issus de parents immigrés d’Afrique subsaharienne dont le cheminement est marqué à la fois par une forte participation aux études supérieures, une entrée relativement tardive et une discontinuité. Alors qu’au départ, la presque totalité d’entre eux s’inscrit à l’université à l’âge de 19 ans, seulement un sur dix y persévère et y obtient un diplôme, tandis que huit sur dix effectuent une bifurcation vers le collège où ils décrochent un diplôme. Au final, comme le soulignent Taylor et Krahn (2005), les jeunes Canadiens issus de l’immigration ont en commun des aspirations scolaires élevées qui se traduisent par un taux de participation élevée aux études supérieures. Toutefois, ils mènent différemment leur carrière scolaire. Les résultats de cette étude montrent en effet que leurs cheminements scolaires se différencient en ce qui a trait à l’âge d’entrée aux études supérieures, au type de programme initial (collégial ou universitaire) auquel ils s’inscrivent et à la probabilité de persévérer dans ce même programme ou, au contraire, d’effectuer une bifurcation vers un autre. CJHE / RCES Volume 46, No. 2, 2016 Immigration et cheminements scolaires aux études supérieures au Canada / 242 P. C. Kamanzi, N. Bastien, P. Doray, & M.-O. Magnan Au terme de cette étude, nous devons reconnaître au moins deux limites associées aux contraintes imposées par la base de données utilisée. La première est que, compte tenu des effectifs faibles dans plusieurs sous-catégories d’immigrants, certains groupes d’immigrants ont dû être groupés, alors qu’ils présentent des différences à plusieurs égards. Pour la même raison, nous avons dû regrouper les étudiants de l’université et ceux des collèges pour la plupart des analyses, alors que les deux institutions représentent des réalités différentes, notamment en ce qui concerne les exigences d’admission et de réussite aux études. La deuxième limite est associée au fait que la majorité des sujets de notre échantillon est née au Canada, alors que la population scolaire est de plus en plus composée de jeunes immigrants de 1re génération dont les parcours sont probablement très différents de ceux de leurs pairs de 2e génération. En dépit de ces limites, notre étude offre des résultats intéressants qui ouvrent sur de nouvelles perspectives de recherche. Elle montre, entre autres, que les cheminements scolaires aux études supérieures varient selon l’origine géographique des immigrants et que certains groupes connaissent des parcours scolaires relativement plus difficiles que d’autres. Des politiques de soutien bien ciblées en amont comme en aval seraient ainsi envisageables pour renforcer leur persévérance car, plus que jamais, comme le soulignait déjà Dewey il y a cent ans, l’équité en éducation demeure un instrument de démocratie incontournable (Dewey, 1916). Remerciements La présente recherche a été menée grâce à la subvention du Fonds de recherche du Québec – Société et culture (FRQSC) et au soutien financier accordé au Réseau canadien des centres de données de recherche (RCCDR) par le Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH) et les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC). Références Abada, Hou, T. F., & Ram, B. (2009). Ethnic differences in educational attainment among the children of Canadian immigrants. Canadian Journal of Sociology/Cahiers canadiens de sociologie, 34(1), 1-28. Abada, T., & Tenkorang, E. Y. (2009). 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Notes en fin de texte L’intégration scolaire est entendue ici dans le sens que les élèves issus de l’immigration fréquentent les mêmes écoles que leurs pairs non immigrants et, le cas échéant, bénéficient de certains moyens compensatoires pour combler les lacunes susceptibles de faire obstacle à leur scolarisation. 2 Signalons d’emblée que, même si cela était plus intéressant, il ne nous est pas possible de faire des analyses séparées pour l’accès aux études collégiales et universitaires, en raison des effectifs faibles d’entrée aux études considérées pour les âges 21-23 ans. 3 Les termes immigrants de 1re et de 2e génération désignent ici, selon la définition de Statistique Canada (2013), respectivement les répondants nés à l’étranger et ceux qui sont nés au Canada mais de parents immigrants. Quant à celui de 3e génération, il renvoie aux répondants dont les parents sont eux-mêmes Canadiens de naissance. 4 Lorsque ces effectifs se révèlent trop minces, nous les regroupons. 5 Pour alléger la présentation, nous nous sommes limités aux résultats du modèle 3 associés à la variable d’intérêt dans cette étude, soit l’origine géographique des parents des répondants. L’ensemble des résultats pourrait être fourni sur demande. 6 Selon la définition de l’auteur, ce concept renvoie au « changement important et brutal dans l’orientation de la trajectoire, dont à la fois le moment et l’issue étaient imprévisibles, pour l’acteur comme pour le Sociologue » (Bidart, 2006, p. 31), et se distingue donc des transitions anticipées par l’acteur. Le fait que l’individu interrompt une trajectoire de façon imprévue constitue une discontinuité du processus initialement envisagé. 7 Dans ce dernier cas, les écarts observés pourraient être attribués aux différences de structure des systèmes scolaires des provinces, ainsi que l’importance relative de l’enseignement supérieur dans le marché du travail. 1 Personne-ressource Pierre Canisius Kamanzi Université de Montréal Département d’administration et fondements de l’éducation [email protected] CJHE / RCES Volume 46, No. 2, 2016 Immigration et cheminements scolaires aux études supérieures au Canada / 248 P. C. Kamanzi, N. Bastien, P. Doray, & M.-O. Magnan Pierre Canisius Kamanzi est professeur au Département d’administration et fondements de l’éducation de l’Université de Montréal. Ses recherches portent sur les inégalités sociales et scolaires et plus particulièrement sur l’enseignement supérieur. Nicolas Bastien est agent de recherche au Centre interuniversitaire de recherche sur la science et la technologie de l’Université du Québec à Montréal. Ses principaux intérêts de recherche portent sur l’enseignement supérieur, les dynamiques de reproduction sociale, les politiques publiques, le marché du travail et, plus largement, sur les dynamiques de population. Pierre Doray est professeur titulaire au département de sociologie de l’Université du Québec à Montréal. Il est l’auteur de nombreuses publications et communications scientifiques portant sur les parcours étudiants dans l’enseignement postsecondaire, le développement de la formation des adultes ainsi que la formation professionnelle et technique. Marie-Odile Magnan est sociologue de l’éducation et professeure au Département d’administration et fondements de l’éducation de l’Université de Montréal. Elle est auteure de plusieurs recherches portant sur les parcours scolaires et postsecondaires des jeunes issus de l’immigration et sur les pratiques d’équité en milieu scolaire pluriethnique. Annexe Annexe 1 : Tableau 1 : Test de la proportionnalité des risques basé sur le résidu de Schoenfeld Pays de naissance des parents Deux parents nés au Canada (référence) Un seul parent né au Canada Europe / pays anglo-saxon 1re génération 2e génération Asie du Sud-Est 1re génération 2e génération Afrique subsaharienne 1re génération 2e génération Amérique latine et Caraïbes 1re génération 2e génération Autres 1re génération 2e génération rho chi2 df Prob>chi2 0,02226 0,23 1 0,6290 -0,03472 -0,00563 0,31 0,01 1 1 0,5761 0,9260 0,04200 0,04848 0,57 0,52 1 1 0,4488 0,4720 0,04365 -0,01101 0,74 0,04 1 1 0,3907 0,8415 0,04382 -0,02774 0,51 0,25 1 1 0,4772 0,6148 0,02337 0,04095 0,16 0,42 1 1 0,6932 0,5180 CJHE / RCES Volume 46, No. 2, 2016
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