91 Book Reviews/Comptes Rendus John S. Moir, A History ofBiblicalStudies in Canada, Chico,ScholarsPress, 1982. A maintes reprises, les étudiants m'ont posé des questions sur l'histoire des études bibliques au Canada: quels étaient les liens qui unissaient l'Angleterre, les EtatsUnis et le Canada? Quelle influence avait eu la tradition allemande sur les chercheurs canadiens? Quel impact avait réellement eu le modernisme sur les études bibliques? Qui était le père des études bibliques au Canada? En voulant répondre à ces questions, j'ai dû vite constater que les recherches historiques étaient minces. Avec le livre de MOIR, je ne pourrai peut-être pas tout dire, mais je pourrai présenter quelque chose de plus complet et de plus satisfaisant. Le terrain n'était pas occupé, maintenant il l'est. Ainsi, je ne peux que me réjouir de la parution du livre de J.S. MOIR. Et je le fais sans hésitation en dépit de certaines faiblesses que je relèverai plus loin. Le livre est exemplaire dans sa méthode. Il s'agit d'une histoire chronologique qui tente de retracer les événements importants et de souligner l'apport de chercheurs qui ont influencé le développement des études bibliques au Canada. On pourrait sans doute reprocher à MOIR de ne pas avoir assez insisté sur les préjugements qui ont poussé les études bibliques, à un momnet ou l'autre, dans telle ou telle direction. On pourrait aussi lui reprocher de ne pas avoir assez insisté sur l'histoire des idées et sur leurs influences postérieures. Mais ces reproches tiennent davantage à des problèmes qui relèvent de l'écriture de l'histoire elle-même. MOIR a choisi un genre d'écriture, il lui est fidèle et le résultat en est heureux. Je ne peux toutefois pas passer sous silence certaines faiblesses de cette étude historique: 1) l'histoire des études bibliques au Canada de MOIR est avant tout l'histoire des études bibliques de la communauté anglo-protestante canadienne; 2) cette orientation de fond explique le peu de place faite à l'histoire des études bibliques dans les communautés catholiques francophones et anglophones au Canada. Oh! il y a bien les pages 79 à 84 qui traitent de ce sujet. Mais il y avait davantage à dire; ce qui est dit est trop peu et trop incomplet pour être satisfaisant. Les études bibliques chez les francophones catholiques — pour ne parler que de ce que je connais le mieux — n'ont pas commencé en 1943 avec la parution de Divino Afflante Spiritu. Il se donnait déjà des cours de grec et d'hébreu biblique à la Faculté de théologie de Québec vers 1850 et des cours d'hébreu à son école affiliée de Montréal en 1877-78 (cf. le régistre des inscriptions no 1, 1840-1900, Grand Séminaire de Montréal). La Faculté de théologie de l'Université de Montréal a instauré des cours de grec et d'hébreu biblique en 1928-29 et peut-être un peu avant. Durant toute cette période (1850-1930), il y avait des professeurs attitrés à des cours en études bibliques. Le modernisme a ici aussi soulevé les passions et entraîné de fortes discussions. Il est toutefois exact que l'essor des études bibliques dans le milieu catholique se fera à partir de 1943. 92 Book Reviews/Comptes Rendus A ce sujet, il aurait été intéressant de parler des développements rapides et des discussions intenses que cet essor a créés: la difficile acceptation des méthodes modernes vers les années 1950-1960, la mise au ban et même l'exil organisé de certains professeurs d'exégèse; l'apport de certains chercheurs (ex.: Guy Couturier à Tel] el-Far'ah) à l'archéologie, l'influence des chercheurs allemands et français sur les exégètes catholiques depuis 1950. . . Bref, il y avait davantage à dire. De plus, ces informations ne devraient pas constituer un chapitre à part, mais être incorporées à la trame historique tout au long du volume. 3) A partir de la page 66, MOIR s'attarde trop exclusivement à la CSBS et à son évolution. Il s'éloigne ainsi de son but premier: écrire l'histoire des études bibliques au Canada. Ce choix donne l'impression que l'A. commence un autre travail, soit celui d'écrire l'historié de la CSBS. Je crois que cette coupure est malheureuse; 4) enfin, l'A. passe beaucoup trop vite sur les résultats des études bibliques au Canada depuis 1960. Il me semble qu'un chapitre sur ce sujet aurait permis de découvrir les richesses, les forces et les faiblesses actuelles en plus de fournir un panorama qu'on ne retrouve nulle part ailleurs. En affirmant cela, je considère que le dernier chapitre de l'étude de MOIR intitulé "No Mean place" (pp. 79106) serait à réécrire complètement dans la perspective dont je viens de parler. Quoi conclure de toutes ces remarques? MOIR a fait un travail de pionnier rassemblant pour la première fois des informations diverses qui jettent un éclairage certain sur l'évolution des études bibliques au Canada. Toutefois, ce travail exige des compléments qui sont nécessaires pour fournir une vue d'ensemble plus exacte et plus équilibrée. Ces compléments devraient inclure ce qui s'est passé dans le monde catholique francophone et anglophone, sinon toute histoire des études bibliques au Canada sera tronquée. Pierre Guillemette Faculté de théologie Université de Montréal