The Canadian Journal of Higher Education, Vol. X-2, 1980 Politiques et pratiques d'interdisciplinarité* NADIA ASSIMOPOULOS ET CHARLES H. BÉLANGER** RESUME L'Université de Montréal, à l'instar d'autres institutions, a implanté au début des années '70 une politique d'ouverture disciplinaire. Elle correspondait aux yeux des responsables, à la solution adéquate de certains problèmes socio-économiques: nécessité de répondre à des contraintes d'ordre financier, à des besoins d'évolution scientifique des disciplines ainsi qu 'à la satisfaction des besoins exprimés par les étudiants. Après quelques années de mise en place de cette politique, il fut nécessaire d'en évaluer l'efficacité. La présente étude répond à cet objectif en examinant l'évolution des trois dimensions suivantes de ce phénomène: l'ouverture théorique des programmes, le comportement des étudiants en matière interdisciplinaire et la capacité des départements d'attirer les étudiants des autres disciplines. Il appert que, si dans l'ensemble la structure des programmes se modifie pour se conformer aux exigences d'ouverture disciplinaire, en pratique la spécialisation prévaut: les étudiants ont une forte tendance à suivre l'enseignement de leur discipline et lorsqu 'ils fréquentent les cours offerts par d'autres départements, ils préfèrent choisir des disciplines connexes. Il semble donc que la modification des programmes n 'est pas une condition suffisante pour changer les pratiques d'enseignement. Il faudra également contrer la résistance due à l'autonomie départementale en obligeant les étudiants à choisir un nombre minimum de cours hors de leur disicpline. ABSTRACT At the beginning of the 1970 decade, the Université de Montréal moved to make its curricular approach more open to interdisciplinarity. This departure from traditional * Une version préliminaire de cette recherche fut présentée à la rencontre annuelle de l'Association for Institutional Research, Houston, Texas, 1978. Les opinions exprimées dans ce document sont celles des auteurs et ne représentent pas nécessairement la position du Bureau de recherche institutionnelle. ** Bureau de recherche institutionnelle, Université de Montréal. 4 0 Nadia Assimopoulos et Charles H. Bélanger distribution requirements was regarded as the solution sought to meet new socio-economic realities such as financial constraints, expansion of knowledge, and student demands for more relevance. A fter a few years of policy implementation on that matter, many individuals and committees within the Institution had become inquisitive about the degree of effectiveness of those policies. The purpose of this study is threefold: to determine the magnitude of the range set up by departments in their degree program structures to give students an opportunity to take courses outside their basic disciplines; to assess the degree of students' responsiveness to utilize course offerings outside their basic disciplines; and to measure the ability of departments to attract non-major students from related and foreign disciplines. The results indicate that although departments modified their degree program structures to conform to the interdisciplinary objective, over-specialization still prevails. Student majors have a tendency not to take advantage of the more flexible degree program structures to go out of their basic disciplines; when they do consume credit hours outside their departments, they do so mostly in related disciplines. It appears that, in order to implement interdisciplinary practices, minimum standards for breadth and maximum standards for depth need to be set up. Problématique générale des tendances interdisciplinaires Dans les années '70 les questions touchant l'interdisciplinarité ont constitué (avec le problème éternel du financement) une des préoccupations majeures des institutions universitaires. Cette problématique s'élève contre la compartimentation trop rigide de l'activité scientifique en diverses disciplines. L'Université, lieu de création de transmission et d'accumulation du savoir, traverse une "crise" maintes fois constatée au niveau mondial. Cette crise résulte en partie de l'incapacité de l'Université à s'adapter à un environnement social en constante évolution. Le découpage des disciplines traditionnelles, en particulier, n'est plus apte à répondre aux besoins sociaux actuels. Il apparaît dès lors nécessaire d'amorcer le processus de décloisonnement des disciplines; cette entreprise présente bien des difficultés étant donné que la plupart des programmes sont l'héritage d'un passé encore très récent. L'évolution vers le dépassement d'une "disciplinarité" rigide répond à un certain nombre de besoins. Tout d'abord, les hommes de science ont souvent tendance à s'hyperspécialiser restant ainsi isolés du progrès réalisé par leurs collègues des autres disciplines (Strauss, 1973). Le développement d'une discipline exige de plus en plus le recours aux connaissances cumulées dans des champs de recherche variés. L'évolution technologique, en particulier, en raison de ses exigences nouvelles, doit s'appuyer sur des personnes possédant une formation polyvalente permettant de comprendre les liens entre divers phénomènes. Ainsi, les intérêts scientifiques actuels vont souvent de pair avec une démarche interdisciplinaire (Swora et Morrison, 1974). En deuxième lieu, les aspirations des étudiants s'orientent davantage vers l'acquisition des connaissances diverses aptes à les aider à s'intégrer dans un milieu social constamment en transformation. Il ne s'agit pas ici simplement d'un besoin qui découle des nécessités de la formation professionnelle. Les étudiants d'aujourd'hui se rendent compte que le 41 Politiques et pratiques d'interdisciplinarité "spécialiste", pour agir efficacement, doit se doubler d'une formation générale, autant en compréhension qu'en étendue, en recourant à d'autres approches disciplinaires. Mais surtout, ils reconnaissent de plus en plus la nécessité de comprendre les implications sociales de toute démarche scientifique. Dans ce sens, les pressions exercées par les étudiants vont vers une prise en considération des dimensions socio-économiques, voire politiques de la science, et de l'intégration de la personne à son milieu socio-culturel. L'étudiant ne se veut plus détaché, sous le couvert de la scientificité, de la réalité sociale dont il fait partie. La question de formation "adéquate selon des critères sociaux plutôt que selon des critères étroitement professionnels" demeure entière (Heaney, 1976, p. 440). En troisième lieu, la modification de l'environnement social, soumet à la réflexion scientifique des problèmes d'ordre nouveau qui ne sauraient en aucun cas être abordés par une seule approche disciplinaire. Si l'on pense au développement urbain, à titre d'exemple, il est clair que les aspects socio-économiques et culturels doivent maintenant faire partie intégrale de la préparation d'un urbaniste. Finalement, il existe d'autres problèmes d'ordre socio-économique dont la solution pourrait en partie résider dans une formation interdisciplinaire de l'individu. Le taux de chômage des jeunes diplômés en est un exemple évident. Une formation interdisciplinaire favoriserait l'adaptation à la mobilité d'emploi et à la réorientation en termes de carrière. Ainsi, l'interdisciplinarité est apparue, aux yeux d'un nombre de plus en plus grand de personnes et d'institutions, comme la panacée à des problèmes socio-économiques importants. D'autant plus que les difficultés financières qu'éprouvent depuis quelques années les institutions universitaires les contraignent à exploiter davantage les ressources déjà existantes et à éviter le gaspillage de l'effort scientifique, que ce soit dans le domaine de l'enseignement ou dans celui de la recherche (Pickar, 1970). Partant de ces préoccupations d'ordre général, l'Université de Montréal a décidé, au début des années '70, d'orienter son enseignement dans le sens de l'interdisciplinarité. Il faut préciser cependant que l'institution était en outre motivée par des préoccupations plus spécifiques liées aux modalités de son fonctionnement interne: la clientèle étudiante de certaines disciplines traditionnellement populaires avait une nette tendance à diminuer, entraînant une baisse notable de la charge d'une partie du corps professoral permanent. De plus, les changements socio-culturels importants de la société québécoise contribuèrent à augmenter le désir d'une meilleure compréhension des transformations opérées. Nécessité de promouvoir l'interdisciplinarité à l'Université de Montréal C'est ainsi que l'Université de Montréal, consciente de la difficulté que présentait cette réforme complète des programmes dans le sens de l'interdisciplinarité, a tenu, par le truchement de sa Commission des études, à inciter les responsables des programmes à apporter les transformations appropriées. Ces modifications consistaient essentiellement à assouplir les structures alors en vigueur en fonction des objectifs suivants: d'une part, assurer une formation adéquate dans la discipline de base de l'étudiant; d'autre part, permettre aux étudiants qui le désiraient de se sensibiliser à d'autres approches disciplinaires. Quelques années après l'implanation de ces politiques, diverses instances de l'institution ont commencé à s'interroger sur l'efficacité de leur mise en pratique. La présente recherche 42 Nadia Assimopoulos et Charles H. Bélanger comporte l'évaluation de trois objectifs centrés sur la pratique réelle de l'interdisciplinarité: 1) déterminer l'étendue de la possibilité offerte aux étudiants, par la structure même des divers programmes d'enseignement universitaire, de suivre des cours "hors-discipline": que ce soit des cours offerts par des disciplines qui appartiennent au même champ d'études ou par d'autres disciplines apparemment étrangères à la formation de base des étudiants; 2) évaluer le comportement des étudiants en la matière: jusqu'à quel point profitent-ils de cette flexibilité théorique de la structure de leur programme afin d'élargir leur formation initiale; 3) évaluer la capacité des départements à attirer les étudiants d'autres disciplines, ce qui suppose la nécessité d'adapter leur enseignement à une clientèle non spécialisée. Définition des concepts Avant de présenter la démarche méthodologique, ainsi que l'analyse et l'interprétation des données de cette recherche, il est nécessaire d'apporter certaines clarifications d'ordre terminologique. En effet, il semble que l'utilisation du terme interdisciplinarité reste encore confuse et recouvre une série d'autres manifestations des mouvements de contact entre disciplines: multi- pluri- ou trans- disciplinarité. La typologie qui a été retenue dans le cadre de cette étude est celle établie par le Centre pour la recherche et l'innovation dans l'enseignement (1972, pp. 23 et 77 à 190). Ainsi, le concept de multidisciplinarité désigne une situation qui est fréquemment rencontrée dans la recherche où une gamme de disciplines sont simultanément proposées sans que les relations qui existent entre elles soient explicitement mises en relief. Ex. Musique et Mathématiques et Histoire. Par ailleurs, le concept de pluridisciplinarité désigne également une situation de juxtaposition de disciplines mais qui sont groupées selon certaines affinités apparentes. Ex. Mathématiques et Physique. Dans ces deux cas, il s'agit surtout d'un regroupement, qu'il soit intentionnel ou non, de modules disciplinaires plus ou moins rigides. Quant au terme d'interdisciplinarité, il désigne une autre réalité: le regroupement des disciplines connexes avec une axiomatique commune. L'interaction qui existe alors entre deux ou plusieurs disciplines peut être de degrés très variés, allant de la seule transmission des connaissances acquises à l'intégration mutuelle des concepts et méthodes. Ex. les diverses disciplines qui contribuent à l'étude de l'environnement. Finalement, la notion de transdisciplinarité suppose la coordination de toutes les disciplines sur la base d'une axiomatique générale nouvelle. Ainsi la diversification des disciplines aboutit à des changements au niveau de leur contenu et de leur structure. Pour résumer, il semblerait que la différence dans l'utilisation adéquate de ces divers concepts réside surtout dans le degré d'intensité des liens d'interaction entre disciplines (Palmade, 1977). Démarche méthodologique a) Echantillon Afin d'évaluer les pratiques d'interdisciplinarité à l'Université de Montréal, il était nécessaire d'établir au préalable un échantillon d'un ensemble de disciplines représentant les divers domaines de la connaissance. Ainsi, ont été sélectionnées dans chacun des cinq 43 Politiques et pratiques d'interdisciplinarité (5) grands champs d'études scientifiques, quatre (4) disciplines, à savoir: - les sciences exactes (Chimie, Mathématiques, Physique et Sciences biologiques); — les sciences humaines (Etudes anglaises, Etudes françaises, Géographie et Philosophie); — les sciences sociales (Histoire, Psychologie, Sciences économiques et Sociologie); - les sciences de la santé (Médecine, Médecine dentaire, Pharmacie et Sciences infirmières); — les "autres sciences" (Droit, Service social, Education - enseignement élémentaire — et Architecture); dans cette dernière catégorie, assez disparate, sont donc inclues les disciplines à caractère professionnel mais ne faisant pas partie des Sciences de la santé. Il est à noter que lors de l'analyse toutes les disciplines appartenant au même champ d'études ont été considérées comme des disciplines "connexes"; tandis que toutes les autres ont été qualifiées d ' " e x t e r n e s " . Cette distinction s'avère primordiale pour des raisons d'ordre conceptuel. En effet, les mouvements entre disciplines qui appartiennent à un même champ d'études {Ex. les échanges entre Mathématiques, Chimie et Physique) sont de nature pluridisciplinaire ; tandis que les mouvements entre disciplines "externes" {Ex. les échanges entre Sociologie et Mathématiques) relèvent plutôt de l'interdisciplinarité. b) Structure des programmes Lorsque cet échantillon de vingt (20) disciplines fut établi, la démarche suivante fut de procéder à l'analyse des structures de leurs programmes respectifs. Le but de cette démarche était de déterminer la possibilité théorique de chacun de ces programmes à l'une ou l'autre des formes de mouvements entre disciplines, c'est-à-dire d'une part, évaluer dans quelle mesure ces programmes permettaient à l'étudiant de sortir de sa discipline et de suivre l'enseignement dispensé par d'autres disciplines et, d'autre part, constater dans quelle mesure cette possibilité théorique de suivre un enseignement hors-discipline orientait l'étudiant vers des disciplines connexes ou lui permettait d'avoir accès à l'enseignement des autres disciplines. A ces fins, il était important de savoir si la souplesse d'un programme, si souplesse il y avait, n'était qu'apparente en canalisant l'apprentissage de l'étudiant vers un enseignement nécessaire à sa formation de base (Ex. importance des mathématiques dans l'étude de la physique); ou si, au contraire, la structure du programme permettait à l'étudiant de suivre des cours dans une discipline à priori étrangère à la sienne. La distinction entre ces deux aspects a été possible par l'analyse des restrictions que comporte la Structure d'un programme. En effet, chaque programme peut, théoriquement, se diviser en trois (3) parties: - une partie "obligatoire": l'étudiant qui désire obtenir son diplôme doit réussir tous les cours qui y sont assignés; - une partie "optionnelle": l'étudiant doit faire son choix au sein d'un certain nombre de "blocs" de cours. Ce choix s'effectue selon des modalités définies par le programme qui délimitent à la fois le maximum et le minimum de cours à suivre à l'intérieur de chacun de ces blocs à option; — une partie "libre": l'étudiant garde toute initiative pour le choix de ses cours; il peut alors suivre des cours appartenant à sa propre discipline aussi bien qu'à des disciplines connexes ou entièrement externes. L'analyse de l'importance accordée par un programme à chacune de ces trois (3) catégories (cours "obligatoires", "à o p t i o n " , et "au choix") conjointement avec l'analyse de 4 4 Nadia Assimopoulos et Charles H. Bélanger la provenance disciplinaire de chacun des cours nommément définis a permis de faire l'évaluation de la permissivité en matière interdisciplinaire de ce programme. A cette fin, dans une première étape, la proportion de chacune de ces trois (3) catégories de cours au sein de la structure d'un programme fut relevée. Les cours "obligatoires" sont ceux considérés comme indispensables à la formation de base dans cette discipline et dont l'étudiant ne saurait se dispenser. Les cours "à o p t i o n " sont également constitués selon le principe de la formation disciplinaire mais permettent telle sous-spécialisation plutôt que telle autre. Les cours "obligatoires" et "optionnels" relèvent d'une formation disciplinaire ou, au plus, pluridisciplinaire. Quant aux cours "au choix", ils peuvent, théoriquement du moins, ouvrir les portes à des mouvements interdisciplinaires. Dans une deuxième étape, les niveaux minimal et maximal du couloir multidisciplinaire permis par la structure du programme furent déterminés. Et, finalement, la possibilité offerte à l'étudiant de s'orienter vers des disciplines externes plutôt que connexes a pu être évaluée. Lors de l'analyse de la structure des programmes, le problème de la pluralité des programmes conduisant à un diplôme au sein d'une même discipline a été soulevé. Il fut alors décidé d'analyser uniquement la structure des différents "baccalauréats spécialisés" ou leur équivalent (Ex. doctorat en Médecine). Cependant, le programme d'un baccalauréat spécialisé peut comporter plus d'une orientation (Ex. le B.Sc. spécialisé en Physique a deux (2) orientations: générale et biophysique). Dans ce cas, l'orientation retenue est celle apparaissant comme la plus représentative du corpus de cette discipline. 1 Afin d'avoir une indication de l'évolution des programmes vers une interdisciplinarité, en conformité avec les directives de la Commission des études, l'analyse de leurs structures porte sur une période de six (6) ans, soit les années académiques allant de 1974-1975 à 1979-1980. c) Analyse matricielle Après avoir déterminé l'ouverture théorique d'un programme, il était nécessaire de voir dans quelle mesure elle était opératoire. Ainsi, il fallait chercher à connaître les pratiques interdisciplinaires des étudiants, c'est-à-dire jusqu'à quel point ont-ils profité des possibilités offertes par la structure de leur programme pour fréquenter l'enseignement d'autres disciplines. Dans ce but, une matrice de crédits-étudiants générés par le programme (Induced Course Load Matrix) fut utilisée. Une lecture horizontale de cette matrice permet de saisir l'ampleur et la direction du mouvement interdisciplinaire des étudiants inscrits à un programme: dans quelle proportion ont-ils tendance à sortir "hors-discipline", et dans quelle proportion s'orientent-ils vers des disciplines externes plutôt que connexes. Une lecture verticale de cette matrice fournit par contre une bonne évaluation de l'attraction qu'exerce une discipline auprès des étudiants d'autres disciplines, qu'elles soient connexes ou non. Il est ainsi possible de voir si un département (unité administrative qui correspond à une discipline) est refermé sur lui-même ou si, au contraire, il contribue à la formation des étudiants provenant des autres départements. En jargon administratif à l'Université de Montréal, cette lecture verticale de la matrice quantifie le "service à la communauté universitaire" fourni par un département. 1. 11 s'avère que cette orientation est aussi celle qui est, en général, la plus fréquentée par les étudiants inscrits au programme. 45 Politiques et pratiques d'interdisciplinarité Ouverture théorique des programmes Comme il a été mentionné précédemment, l'analyse des structures des programmes retenus porte sur six (6) ans. Une première constatation qui s'impose est que, dans l'ensemble, l'ouverture théorique des programmes reste quasiment inchangée durant cette période. Si neuf (9) des vingt (20) programmes analysés ont subi une modification qui a eu une incidence sur l'étendue du couloir théorique de multidisciplinarité, celle-ci n'est importante que dans quatre (4) cas seulement, soit Physique (6%), Geographie (6%), Philosophie (7%), Psychologie (13%). Pour Géographie, Philosophie et Psychologie cette modification va dans le sens d'un élargissement de la possibilité d'interdisciplinarité, tandis que pour Physique, au contraire, elle est orientée vers un amincissement de cette possibilité. Etant donné la stabilité de la majorité des programmes en termes d'ouverture théorique à l'interdisciplinarité, il a été décidé de retenir, pour fins comparatives, les structures de l'année 1979-1980. Cette comparaison démontre que les programmes diffèrent énormément quant à l'importance qu'ils accordent théoriquement à l'interdisciplinarité (voir tableau 1). La gamme d'ouverture préconisée dans chacun d'eux s'étend d'aussi peu que 4% de l'ensemble des cours (Médecine) jusqu'à 67%(Sciences biologiques). Pour des raisons d'analyse, les diverses disciplines étudiées furent regroupées en trois (3) catégories selon l'importance de l'ouverture théorique prévue par leurs programmes: — dans une première catégorie, ont été inclues les sept (7) disciplines les plus "permissives" dont l'ouverture peut atteindre une proportion de 30% ou plus du programme; — dans une deuxième catégorie, se trouvent les dix (10) disciplines de permissivité "moyenne": c'est-à-dire, celles dont l'ouverture se situe entre 20% et 29% ; — la troisième catégorie comprend les trois (3) disciplines les plus "restrictives"; celles dont l'ouverture théorique maximale ne dépasse pas 10% du programme. Il est intéressant de constater que le modèle d'ouverture théorique se présente différement lorsqu'on fait intervenir la notion de discipline connexe. Par exemple, le programme des Sciences biologiques donne à ses étudiants la possibilité de suivre jusqu'à 67% de leurs cours hors-discipline. Cependant, si un étudiant le désire, il pourrait choisir la totalité de ses cours au sein de disciplines connexes, et seulement 11% dans des disciplines externes. En Sociologie, la possibilité d'ouverture maximale est de 27%. Donc, il peut utiliser l'ouverture dans le sens d'une vraie interdisciplinarité. Par contre, l'étudiant en Psychologie ne subit aucune contrainte de ce genre et peut prendre la totalité de ses 23% de cours horsdiscipline dans des matières connexes aussi bien que dans des champs disciplinaires externes. Dans l'ensemble, les disciplines dont l'ouverture théorique apparaît comme la plus "permissive" ne permettent pas tellement à leurs étudiants de sortir de leur champ d'études. Il semble que dans leur cas, les liens qui existent entre disciplines connexes sont très étroits et canalisent l'enseignement vers un mouvement de pluridisciplinarité. Qui plus est, l'analyse des cours hors-discipline prévus par la structure du programme révèle qu'il s'agit surtout d'un enseignement considéré comme indispensable à la formation de base de l'étudiant (Ex. l'enseignement de Mathématiques adressé aux étudiants en Physique). Les disciplines des deux autres catégories permettent en revanche à leurs étudiants d'opter, s'ils le désirent, dans une proportion égale, entre des cours connexes ou externes. Les seules exceptions concernent Médecine dentaire, Physique et Chimie, où l'ouverture 46 Nadia Assimopoulos et Charles H. Bélanger TABLEAU 1 P O S S I B I L I T E T H E O R I Q U E DE M U L T I D I S C I P L I N A R I T E Discipline ou profession Sciences biologiques Etudes anglaises Sciences infirmières Etudes françaises Ens. élémentaire Sciences économiques Champ Limite supérieure Accumulation maximale d'études du c o r r i d o r m u l t i - Discipline connexe disciplinaire % EXA HUM SAN HUM 67 50 45 37 33 33 32 67 50 25 37 32 11 20 20 20 26 33 11 10 29 3 27 27 27 6 23 20 20 7 Pharmacie AUT SOC SAN Physique Géographie Chimie Philosophie S e r v i c e social Sociologie Médecine dentaire Psychologie Histoire Mathématiques EXA HUM EXA HUM AUT SOC SAN SOC SOC EXA 29 29 28 27 27 27 23 23 20 20 29 16 28 27 20 20 17 23 20 20 Architecture AUT AUT SAN 7 6 7 6 4 0 Droit Médecine Discipline externe 33 16 6 4 du programme est orientée nettement vers les disciplines connexes; par contre, les étudiants de Médecine qui décident de se prévaloir du 4% permis à l'extérieur de leur département doivent nécessairement le prendre dans des disciplines externes. Pratiques d'interdisciplinarité Si l'ouverture théorique varie énormément d'un programme à un autre, qu'en est-il du comportement des étudiants en matière d'activité interdisciplinaire? S'inscrivent-ils en faveur d'une interdisciplinarité plus poussée ou non? Il ne faut pas écarter la possibilité 47 Politiques et pratiques d'interdisciplinarité TABLEAU 2 P O U R C E N T A G E S DE C R E D I T S - E T U D I A N T S A C C U M U L E S PAR L E S E T U D I A N T S A L ' E X T E R I E U R DE L E U R D I S C I P L I N E D ' A P P A R T E N A N C E DE 1 9 7 4 - 1 9 7 5 A 1 9 7 9 - 1 9 8 0 Accumulation des créditsétudiants Discipline ou profession Champ d'études Corridor théorique de multidisciplinari té Min. M a x . % % 29 23 33 29 27 19 13 30 24 20 10 7 1 27 14 13 1 5 0 45 13 9 0 0 0 0 45 50 33 45 25 26 45 25 22 20 15 4 0 0 1 7 0 0 0 4 19 3 67 32 37 28 16 27 20 28 24 3 0 0 27 27 27 16 25 24 24 8 7 0 % % EXA SAN AUT HUM EXA AUT 19 23 7 3 0 0 Droit Médecine SAN HUM SOC SOC SOC AUT SAN Sciences biologiques Pharmacie Etudes françaises Chimie Sociologie Philosophie S e r v i c e social EXA SAN HUM EXA SOC HUM AUT Physique o — i < es = > c Médecine dentaire Ens. é l é m e n t a i r e Géographie Mathématiques Architecture Sciences infirmières Etudes anglaises Sciences économiques Histoire Psychologie A c c u m u l a t i o n de c r é d i t s hors-discipline 1974-1975 1979-1970 DisciDiscipl ine pl i ne Total c o n n e x e Total c o n n e x e 23 6 4 12 26 13 11 16 16 22 12 4 22 15 4 0 0 25 24 23 21 15 11 5 que ce comportement puisse varier selon la nature du programme et de la discipline. Le tableau 2 regroupe les disciplines étudiées en trois (3) catégories selon le sens dans lequel s'est divisé le comportement des étudiants. Dans la première catégorie se trouvent les six (6) disciplines dont les étudiants ont eu tendance à augmenter la proportion des cours pris hors-discipline entre 1974-1975 et 1979-1980. Cependant, ce mouvement s'accompagne d'un renforcement de la tendance à rester au même champ d'études plutôt qu'à élargir la formation par l'inscription à des 48 Nadia Assimopoulos et Charles H. Bélanger cours appartenant à des disciplines externes. C'est en particulier les étudiants en Physique et en Enseignement élémentaire qui s'enferment dans leur champ d'études. Par contre, les étudiants en Géographie se dirigent massivement hors du champ disciplinaire. Quant aux étudiants en Architecture, ils n'esquissent qu'un mouvement hors-discipline très timide en réalité. On serait tenté de qualifier cette discipline comme entièrement enfermée sur elle-même. Cependant, la Faculté d'Aménagement de même que certaines autres facultés s'est engagée dans le processus d'interdisciplinarité par un autre biais. L'enseignement de base d'un certain nombre d'autres disciplines est assumé au sein de la Faculté par des professeurs dont la formation correspond, au moins partiellement, à ces disciplines. Dans la deuxième catégorie sont groupées les sept (7) disciplines dont les étudiants n'ont pas modifié leur pratique d'inscription à des cours hors-discipline. Les étudiants de trois (3) de ces disciplines (Droit, Médecine et Psychologie) restent particulièrement réfractaires à s'éloigner de l'enseignement disciplinaire: ils reçoivent, comme il f u t remarqué précédemment pour les étudiants en Architecture, une formation qui ne laisse guère de place à l'exploration d'autres voies disciplinaires. Dans la troisième catégorie enfin sont regroupées les sept (7) disciplines dont les étudiants ont tendance à diminuer la proportion des cours pris hors-discipline. Ce mouvement est accompagné d'une diminution relative de la proportion de l'enseignement reçu par le biais des programmes connexes. Les étudiants en Service social en particulier se dirigent vers les disciplines externes. Il faut cependant préciser que le Service social, placé dans la catégorie "autres disciplines" en raison de son caractère professionnel, a des affinités évidentes avec les sciences sociales. La comparaison entre l'ouverture théorique des programmes et les pratiques étudiantes indique qu'en général les étudiants ne profitent pas des possibilités qui leur sont offertes pour élargir leur formation. En effet, ils exhibent une tendance à prendre des cours horsdiscipline dans une proportion qui ne dépasse généralement pas le milieu du couloir prévu, sauf pour quelques programmes. Force est de constater que les efforts pour promouvoir les échanges entre disciplines ont eu moins de succès au niveau des pratiques que ce qui avait été espéré au niveau des intentions théoriques. Attraction d'une discipline Toutefois, il existe une autre possibilité d'évaluer les efforts vers un décloisonnement des disciplines. Il s'agit de voir jusqu'à quel point chaque département est disponible pour offrir un enseignement destiné aux étudiants d'autres programmes. A cette fin, une évaluation a été faite du degré d ' " a t t r a c t i o n " de chaque département. Le tableau 3 fournit un nouveau regroupement, en quatre (4) catégories, des disciplines étudiées en fonction de cette nouvelle dimension. Dans la première catégorie, sont inclus tous les départements qui n'apportent aucune contribution à la formation des étudiants des autres disciplines: l'enseignement de ces cinq (5) départements (Architecture, Droit, Médecine dentaire, Pharmacie et Sciences infirmières) est destiné exclusivement à leurs étudiants respectifs. Dans la deuxième catégorie sont inclus les quatre (4) départements qui ont diminué au cours des ans l'importance de leur contribution à la formation des étudiants en provenance de diverses autres disciplines. Ces quatre (4) départements assument dans l'ensemble une plus lourde charge d'enseignement car le nombre d'étudiants de la discipline de base a augmenté. Il 49 Politiques et pratiques d'interdisciplinarité TABLEAU 2 T E N D A N C E DU N O M B R E DE C R E D I T S - E T U D I A N T S A C C U M U L E S PAR LES E T U D I A N T S DE LA D I S C I P L I N E D E BASE ET PAR L E S E T U D I A N T S D E S A U T R E S D I S C I P L I N E S DE 1 9 7 4 - 1 9 7 5 A 1 9 7 9 - 1 9 8 0 Discipline ou profession Crédits-étudiants a c c u m u l é s par les étudiants provenant des a u t r e s d i s c i p l i n e s Tendance du nombre d e crédits-étudiants a c c u m u l é s par les étudiants de autres di sci pi i ne disciplines d e base Tendance générale 1974-1975 1979-1980 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 Sciences économiques Sociologie 5 10 24 21 2 9 22 16 Chimie Etudes anglaises Histoire S e r v i c e social 26 15 4 1 33 53 14 6 Etudes françaises Mathématiques 0 37 + + + + + + Médecine 23 11 48 26 + + + 12 + + + 42 33 11 + + + 0/ Archi t e c t u r e Droit Médecine dentaire Pharmacie Sciences infirmières Ens. élémentaire Géographie Phi 1osophi e Physique Psychologie Sciences biologiques 4 17 23 9 0/ 0 0 0 0 0 _ + + + + - - + + - • + - + + - + + - + + + _ _ + - + + - + + - - + + + + + + semblerait donc que l'afflux d'étudiants aux programmes de ces disciplines s'est manifesté au détriment de l'enseignement donné aux étudiants qui proviennent d'autres disciplines. Les deux autres catégories regroupent les départements qui ont augmenté la proportion de leur enseignement offert aux étudiants hors-discipline. Dans la troisième catégorie, cette 5 0 Nadia Assimopoulos et Charles H. Bélanger augmentation est toute relative car elle est accompagnée d'une diminution des inscriptions étudiantes à leurs programmes respectifs. De ces quatre (4) départements, se dégage comme exemple celui d'Etudes anglaises qui, en 1979-1980, consacre plus de la moitié (53% comparativement à 15% en 1974-1975) de son enseignement aux étudiants d'autres disciplines. Ceci est dû à la conjugaison d'un double phénomène: d'une part, les inscriptions aux programmes de la discipline ont considérablement baissé ; d'autre part, et inversement, les inscriptions de étudiants en provenance d'autres programmes ont augmenté. Dans la quatrième catégorie enfin se trouvent les sept (7) départements dont l'effort vers un service accru au sein de l'Institution s'est accompagné d'une augmentation des inscriptions de leurs propres populations étudiantes. Cet effort est remarquable pour Mathématiques et Physique qui ont une activité de service intense: 48% et 42% respectivement de leur enseignement s'adresse à des étudiants hors-discipline. Il atteint des proportions importantes en Psychologie (33%) et Médecine (26%) mais demeure réduit dans le cas de Philosophie, Etudes françaises et Sciences biologiques. Implications et conclusions Dans l'ensemble, ces résultats prouvent que l'ouverture disciplinaire est loin d'être un fait accompli à l'Université de Montréal et cela malgré les encouragements officiels des différentes instances universitaires dans ce sens. En effet, alors que la structure des programmes se modifie en faveur des mouvements d'échanges entre disciplines (par le truchement surtout des cours "à option" et "au choix"), en pratique, la spécialisation prévaut, et cela dans l'ensemble des programmes de baccalauréat spécialisé. Les causes susceptibles d'expliquer ce phénomène sont diverses (Commission des études, 1977); elles peuvent être d'ordre pratique, tels les changements intervenus aux formules de financement; elles peuvent aussi tenir de considérations d'ordre davantage philosophique, telle la pertinence du changement de la structure d'un programme et la formation professionnelle. Sans sous-estimer l'importance des contraintes d'ordre pratique, il semble que nous devons surtout en attribuer les causes au comportement humain. Telle est l'opinion de Frye (1970) qui attribue ce phénomène à l'ignorance des savants quant aux besoins de leur propre société et à leur isolement dans une tour d'ivoire privilégiée. Comme la majorité des professeurs poursuivent leur carrière au sein de leur propre discipline, leur loyauté et intérêt, legitimes d'ailleurs, pour leur propre sphère de spécialisation tendent à les placer dans une situation de cloisonnement par rapport aux autres sciences. Par conséquent, la flexibilité théorique des programmes ne saurait être la seule composante d'une politique destinée à promouvoir l'interdisciplinarité. 11 faudrait la doubler d'une campagne de sensibilisation menée auprès des scientifiques afin de les convaincre de l'utilité d'une telle priorité. naires, remet en question le principe fondamental de la gestion des programmes actuels. Même si le désir de promouvoir l'ouverture disciplinaire est fortement ancré chez les responsables des programmes, il reste que l'autonomie actuelle des divers départements est de nature à dresser des barrières importantes à un tel mouvement. De plus, il est fort douteux que l'interdisciplinarité au sens précis du terme, puisse pleinement se réaliser en utilisant les cours actuellement en vigueur. Il semble qu'un nouveau corpus de cours apte à confronter les étudiants avec les concepts et méthodes des divers discours scientifiques 51 Politiques et pratiques d'interdisciplinarité pourrait ajouter une dimension valable à leur formation (Harvard, 1978). Cette approche pourrait dépasser les barrières traditionnelles qui existent entre les disciplines. Finalement, de plus en plus d'universitaires semblent, ces dernières années, considérer l'enseignement et la recherche interdisciplinaires comme les points clefs de l'innovation dans les universités. La démarche interdisciplinaire apparaît comme une solution valable à certains problèmes qui se manifestent par la préoccupation d'éviter le "savoir en miettes" et de combler le fossé entre l'activité professionnelle et la formation universitaire. Cependant, l'introduction de cette innovation n'est pas dépourvue de difficultés dont l'origine se trouve autant sur le plan individuel que sur le plan structurel, alors que les différentes composantes disciplinaires sont jalouses de leur savoir et de leur autonomie. En effet, la départementalisation, mise en place dans un but de faciliter le développement et le changement des disciplines, s'avère un élément de résistance au changement (Strauss, 1973). Les départements sont souvent en compétition les uns avec les autres, tant pour les ressources matérielles que pour les ressources humaines. La dichotomie conceptuelle en "deux-cultures" (littéraire-scientifique) de la science (Snow, 1965), ou encore ce qu'on a appelé le monde "convergent-divergent" (Hudson, 1968), ou l'opposition "main-gauche" "main-droite" (Bruner, 1962), est encore fortement ancrée dans les mentalités et reste un véritable obstacle à l'interdisciplinarité. Bien sûr, tous les scientifiques ne sont pas convaincus de l'avantage d'une approche interdisciplinaire. De nombreuses réactions se manifestent qualifiant cette démarche de "dilettantisme" encourageant "les connaissances superficielles, la suffisance et l'illusion du savoir" (CERI, 1972, p. 294). Les critiques ont été souvent justifiées par l'introduction hâtive et mal définie de l'interdisciplinarité dans certaines institutions (Doyal, 1974); ou encore par le fait que les motivations à la base de son introduction n'ont pas toujours été irréprochables (Baum, 1975). En ce qui concerne l'Université de Montréal, il semble que les responsables de la réforme des programmes sont acquis, théoriquement du moins, à la démarche interdisciplinaire. Cependant, les données de la présente étude font ressortir le double paradoxe: d'une part, le cloisonnement des disciplines semble se renforcer sous le couvert apparent de l'interdisciplinarité; d'autre part, les étudiants, qui avaient exercé des pressions en faveur de la démarche interdisciplinaire, ne mettent pas en pratique leurs désirs; ils ne bénéficient que très partiellement de la possibilité qui leur est donnée d'élargir leur formation. D'ailleurs, lorsque les étudiants sortent de leur discipline, ils se dirigent principalement vers des disciplines connexes. Dans une université où l'interdisciplinarité fut l'un des chevaux de la bataille menée pour l'abolition des anciennes structures, et la mise en place de nouvelles 1 dans un passé encore fort récent, il s'agit pour le moins d'un constat d'échec. FOOTNOTE 1 (Voir les structures, rapport du CDA, 1970) Il est à rappeler qu'en 1972 l'Université de Montréal a modifié ses structures. Les anciennes facultés des Arts, des Lettres, de Philosophie, des Sciences et des Sciences sociales furent abolies et regroupées en une structure unique, la Faculté des arts et des sciences. Un des thèmes autour desquels le débat fut engagé était la nécessité du "décloisonnemcnt du savoir" et de l'interdisciplinarité. 52 Nadia Assimopoulos et Charles H. Bélanger REFERENCES Baum, J. Interdisciplinary Studies, the Latest Experimental Rage. College Composition cation, 1 9 7 5 , 2 6 , 30-33. Bruner, J.S. On Knowing: and Communi- Essays for the Left Hand. Cambridge: Harvard University Press, 1962. Centre pour la recherche et l'innovation dans l'enseignement (CERI). L'interdisciplinarité: problèmes d'enseignement et de recherche dans les universités. Paris: Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), 1972. Commission des études. Compte-rendu des 707e et 7 0 8 e réunions. Université de Montréal, 1977. Doyal, L. Interdisciplinary Studies in Higher Education. 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